lundi 28 septembre 2020

L'Arène de Nîmes est-elle Bling-Bling ?

 


Mesdames et messieurs, l’heure est grave : un débat, relayé par la presse écrite régionale, secoue la toile, les tendidos et les zincs, et vient nous emboucaner :

 L’arène de Nîmes est-elle Bling-Bling ?!

Ouh fan de chichourle… la question est d’importance et conditionne la crédibilité de l’aficion locale. Si je le connaissais personnellement, j’appellerais à la rescousse Michel Onfray qui s’emparerait de la question en ingurgitant toute la production bibliographique tauromachique des trois derniers siècles en 8 heures, puis pondrait un essai de 1200 pages en 48 heures, tous paramètres décortiqués. La réponse alors jaillirait dans son évidence.

Maiiiiis et je le regrette croyez-le bien, je suis loin, très loin, de ses facultés intellectuelles et de la puissance de sa pensée. Excusez donc par avance l’indigence de la démonstration.

En préalable, ce qui m’apparaît, c’est que la question est mal posée et mérite je crois cette correction :

L’arène de Nîmes est-elle Bling-Bling, Pouët-Pouët ou Con-Con ?

Cet élargissement ouvre un autre horizon… Je sens déjà tous les babaous se mettre à barjaquer… Sur Facebook, certains déjà sont montés au créneau, main sur le cœur et aficion authentique brandie aussi éperdument que des bras de morts de faim vers un pot de brandade avariée pour s’élever contre la diffamation Viardesque, atteints qu’ils étaient jusque dans leur coupe de champagne, accusant le destrussi d’arriver avec ces esquiches-merdes pour engatser le respectable.

Du coup, grosse estoumagade de fadolis pour sauver l’honneur bafoué de la plaza ''brandade-tapenade-pastaga''. Et les Bling-Bling qui, par définition, sont les plus mal placés pour s’en apercevoir, de choper les fonfonis et de lâcher à son endroit les « counas » et « counifle » d’usage. Enfin, par leurs mots à eux, plus chicos.

Oh con de Manon… le mortier sentant toujours l’aïl, la polémique revenait, on se retrouvait dans la mouscaille. Les mouligasses se roidirent ne comprenant nibe à ce patacaisse et prêts, s’ils le croisaient dans la rue Fresque, à profiter de son étroitesse pour lui coller des pastissons. Aqui n’y a proun vociféraient les pébrons ! Tout un peuple de trépadous des bars de la ville, les violes, stossis, rebabeous et autres brancassis qui sirotent leur Ricard en louchant sur les tafanaris des nines qui passent, se sentirent offensés.

Alors comment rendre notre expertise sur la question en désertant le territoire de la passion pour faire de l’objectivité, le ferment des conclusions à venir ? (là, quand même relisez, c’est technique, et ne me suis pas exprimé comme un pacoulin)

Eh bien justement, en répondant avec honnêteté à des questions simples dont tout le monde a pu apprécier la véracité pendant les corridas :

1)    Le public de cette arène applaudit-il systématiquement toute fin de série de passes même banales, profilées ou ratées ?

     OUI

2)    Est-il majoritairement réprobateur quand s’élève dans la foule une contestation aussi tonitruante qu’évidente sur l’état d’une corne ou la faiblesse d’un toro ?

 

OUI

 

3)    Proteste-t-il avec véhémence lorsque l’oreille qu’il exige est refusée malgré que ce soit  logique ? (désarmés fréquents, toreo profilé, estocade ratée…)

 

OUI

 

4)    Une présidence avare en trophées est-elle le lendemain, accusée d’avoir manqué de ''sensibilité'' ?

 

OUI

 

5)    A-t-on déjà assisté à une pression manifeste de l’empresa surgissant dans le callejon pour ''encourager'' le palco à récompenser ou éventuellement à doigter d’honneur le public, son client ?

 

OUI

 

6)    La sanction suprême infligée par un alguazil se résume-t-elle à un léger tapotis de planche avec la main ?

 

OUI

 

7)    L’arène s’est-elle vidée des aficionados désormais croisés à Vic pour Pentecôte ou à Saint André de Majencoules aux Vendanges pour griller des saucisses, ramasser des oignons et cueillir des cèpes ?

 

OUI

 

8)    A-t-on déjà vu un alguazil – dont le rôle est de faire appliquer en piste les décisions du palco, et de garantir l’éthique de la chose -  couper une oreille en deux avec l’aide de l’empresa sur le bord de la barricade ?

 

OUI     (note personnelle : Hahaha… incroyable !)

 

 

9)    A-t-on déjà vu d’ignobles daubes invalides n’ayant pris qu’un picotazo, finir grâciées dans la liesse générale (« INDULTO ! ») ?

 

OUI

 

10)  A-t-on déjà vu au Palco des types qui n’avaient aucune compétence, voire, assistaient à une corrida pour la première fois ?

 

OUI    (note personnelle : Hahaha… j’ai les noms…)

 

11)  A-t-on vu souvent de vrais faux ''triomphes'' alors que le torero n’a pas toréé mais seulement donné des passes sur le voyage ?

 

OUI

 

12)  Combien, parmi ceux qui pénètrent l’arène, connaissent la différence entre ''péguer des passes'' et toréer ?

DÉGUN ou presque

13)  Les aficionados conscients qui voient des courses depuis des décennies et disent simplement ce qui est, ont-ils déjà été traités d’Ayatollahs, de rabat-joie, de peine à jouir par ceux qui n’y connaissent nibe ?

 

OUI

 

14)  Le public Nîmois n’aime-t-il rien tant que les beaux parleurs qui toréent leurs réserves par la flamboyance du verbe, vantant à l’avance les vrais faux triomphes qui vont systématiquement avoir lieu alors que la tauromachie ne repose que sur une seule constante : l’aléatoire ?

 

SI

 

15)  La programmation de cette arène ne repose-t-elle pas principalement sur de l’événementiel pour lequel on tente de lisser toute aspérité afin que le suave l’emporte sur le danger, le ballet sur le combat, niant ainsi l’essence même de la corrida ?

 

SI

 

16)  N’êtes-vous pas majoritairement en train de penser qu’énonçant tout ceci je nuis à la tauromachie plutôt que d’être enthousiaste à promouvoir cette enquête pour changer tout ça ?

 

SI

 

17)  De part les goûts du public de cette arène, si l’on ouvre une bodega, ne vaut-il pas mieux pour drainer le plus de clients et de CA prévoir des canapés et du champagne plutôt que du chorizo et de la sangria ?

   SI

 

18)  Ne vous êtes-vous pas surpris à plaindre un toro qui aurait du vous inspirer la peur jusque dans la sécurité de votre gradin ?

         SI

19)  Dans la mesure où… Argh… panne de cartouche d’encre bientôt… ;-) et de papier… et puis ça deviendrait fastidieux, hein.

 

Donc, à la lumière des ces réponses objectives, maintes fois constatées, quelle est la conclusion de cette enquête exclusive menée par Photosmotstoros avec toute la rigueur tauromachique nécessaire à l’éclosion de la vérité ?

Eh bien, nous pouvons désormais avec certitude prétendre que Viard se trompe. L’arène de Nîmes n’est pas Bling-Bling !

La plaza nimoîse est Bling-Bling  ET  Pouët-Pouët !

En ce qui concerne le volet con-con, par contre, il n’y a pas suffisamment d’éléments concordants dans le faisceau de preuves énoncées pour l’affirmer de façon péremptoire et indubitable, d’autant que ''Photosmotstoros'' souffre d’une empathie congénitale évolutive pour ses concitoyens qui l’empêche d’être intransigeant et sévère. Néanmoins, Photosmotstoros s’avère suffisamment suspicieux pour estimer qu’il y a un doute…

lundi 21 septembre 2020

A partir du sable

 


Tiens, si on parlait tauromachie. Ça sentait le crottin et la bouse sur l’esplanade, il y a donc du y avoir des quadrupèdes ? Bon, parce qu’à la base, ce blog fourre-tout se voulait un peu taurin quand même, tu te souviens, lecteur ?

Or, qu’avez-vous eu à vous mettre sous la dent ici ? Rien. Si, un compte rendu ciné de ‘’Le bonheur des uns…’’ vu que le malheur des aficionados était organisé sur le sable.

Je connais trop Nîmes, ma ville, que j’aime et qui me fait honte dans ce qu’elle me donne à voir de l’art du combat. Alors comme beaucoup - difficile à remplir les cinq mille places parait-il – comme vous, je n’y vais plus.

Dans la plaza, j’y ai encore un ami qui depuis son abono des premières hors de prix (s’en fout il est riche) m’envoie ses lapidaires sentences :

-       Bananes érodées…

-       Grosses bouses de toros…

-       Public Duracel…

-       Palco de rigolos…

-       Actuacion pueblerina…

-       Cornes de girafes…

Alors, pas bégueule, je lui envoie les miennes, presque aussi lapidaires et vu qu’on se connait depuis l’enfance, je sais qu’on se marre de ce ping-pong :

-       Bien fait pour toi…

-       T’as qu’à pas répéter sous la pique…

-       Ca t’apprendra à humilier…

-       Jette ton fluzz au vent…

-       J’admire ton abnégation classieuse et ton rapport à l’ennui

-       Depuis le temps, au prix de ton abono, t’aurais une IWC, une Omega, une Jaeger-Lecoultre et une Patek-Philippe, putain…

Oui, vous me connaissez, le lapidaire c’est pas mon truc…mais j’essaye. Alors, non, hors de question que je rende compte du naufrage durant des décennies. J’ai déjà donné et à force je vais être suspecté d’être mauvais coucheur ou d’être un triste sire ou d’avoir un compte à régler que sais-je…

Alors je vais vous citer ce que j’ai lu de la part de ceux que j’estime crédibles dans leur appréciation :

<< Le public nîmois, toujours en manque de critères, et toujours prompt à s’enthousiasmer pour le clinquant, veut voir couper des oreilles. Il en a obtenu deux pour Juan Leal au terme d’une faena où le superficiel prit le pas sur l’essentiel. C’est navrant.

Des toros pour une bonne moitié indignes des lieux, justes de forces et sosos pour la plupart

Comment exprimer son toreo quand la matière première fait défaut ? 

Bref, une course à très vite oublier  (Patrick Colleoni)

 

 

On pourrait tenter de mettre des mots. Mais ce serait tromper et trahir.

Les trois premiers toros du jour étaient, à nouveau, imprésentables

Au moment où l'on songeait « ça fait peine », le taureau se coucha par terre, et la messe était dite. Le toro beige, genre peluche, sorti en troisième, était à peu près complètement invalide.

immobile dans le sitio, où l'ectoplasme de la modeste peluche rodait encore un peu.

Les trois suivants furent un peu moins navrants, puisqu'on leur devinait des cornes, ce qui, ce jour, était inédit. Le quatrième était un toro de gala, mais d'un gala pour Ephad où l'on fait semblant de vivre, même quand les forces manquent.

…avant de conclure avec le toro cacochyme.

Et avec ça, des picotazos, une indifférence absolue des deux maestros à la mise en suerte face aux piques (la meilleure mise en suerte sera le fait du sobresaliente Jérémy Banti invité au quite par Sébastien sur le cinquième), des épées désastreuses, entre rincon ordonezien, entière trasera un peu dans le dos et bazonazo de ley et une pluie de descabellos.

Le manque de corridas en cette année de Coronavirus explique sans doute le fait. Deux naufrages consécutifs, y compris en présentation, en deux corridas explique le reste :

 cette impression poisseuse d'inéluctable ressac, de fin de partie, de fin d'un monde.

(Joel Boyer) >>

 

Il est vrai que dans le dernier paragraphe, Joel Boyer trouve des mérites à la ville et à l’empresa, sans doute parce qu’il est bien éduqué, parce qu’avec urbanité et raffinement il s’essaye à trouver des raisons d’être juste et tolérant. Mais, ce qu’on nous propose est ancré depuis tellement d’années, que le Covid-19 n’y est pour rien. Alors moi c’est à partir du sable que je jauge et juge. De la première foulée sur le sable. Et je suis bien obligé de constater que souvent les enfoirés de sangliers qui me retournent mon terrain ont plus de gaz et de sauvagerie que les toritos à la brandade. C’est plutôt une question de sensibilité, de philosophie, d’habitudes ou d’arrangements. Sinon (j’avais écrit Simon…) pourquoi s’enferrer ainsi dans les mêmes travers ? Comment peut-on en arriver à penser qu’il vaut mieux prendre le risque de présenter des invalides épointés pourvu que leurs statistiques de ‘’toréabilité’’ soient bonnes, plutôt que de continuer à honorer le rite extraordinaire en sélectionnant des adversaires pour la race de leur colère ? Qu’on puisse s’extasier sur leur sauvagerie, leur brutalité, s’enflammer sur le pundonor et la maîtrise des toreros poussés dans leurs retranchements, s’exalter de leur abnégation brave sous la pique, de…

Je bloque là-dessus depuis des années.

J’avoue.

Sans comprendre.

Je suis sûr que le Simon, s’il lit ces lignes, il pouffe grave ! C’est un peu comme s’il voulait nous avoir à l’usure… Viendra un moment où tout le monde en aura marre de dénoncer ce qui l’a déjà été maintes fois. Ca sâoule, à constater, à lire et à écrire…

Il m’est arrivé de céder à ce que je n’aime pas : jouer le mondain à l’impé une coupe de champ à la main. (pour roter je préfère la Citrate de Bétaïne, c’est moins cher et comme vin, une vendange tardive saturée de sucre me plait plus) C’est assez instructif, tu rencontres des types, parisiens pour la plupart (à partir de Chamborigaud à peu près, et plus au Nord) qui t’expliquent l’extase vécue du triomphe encore chaud dont tu as constaté qu’il ne s’agissait que d’une grosse bousade profilée…

Là, tout à coup, s’ouvrent à toi deux options pendant que tu réalises que le Simon a réussi son grand remplacement, virer les aficionados en d’autres contrées plus bourrues pour libérer des places aux aficionadeaux encanaillés dans notre Sud, ce Sud qu’ils doivent vivre comme un véritable Far-West à grands frissons :

-       Une écoute polie et amusée sans rien trahir de ta connaissance. Après tout, tu l’as eu toi aussi ta période ‘’découverte euphorique’’ (chouette on peut torturer des zanimos…(y’a des zantis qui lisent, c pour eux… sont tellement largués…))

 

-       Une tentative d’éclairer leur lanterne tout en asseyant ta posture de redoutable connoîsseur…

 

-       T’amuser à abonder dans leur sens pour voir jusqu’où ils se paument. Par Jeu. Mais mes parents et frère Pierre de St Jean Baptiste de la Salle, ne m’ont pas éduqués dans ce sens…

 

Ouais, ok, ça en fait trois, et alors ? Bon, donc, moralité, as usual, y’a eu des toros, mauvais, faibles, imprésentables pour la plupart et je suis trop radin, pas assez urbain et suffisamment écoeuré depuis lurette, pour y assister et vous concocter des resenas qui dénoncent ce que j’ai déjà dénoncé par toutes les paraphrases possibles et imaginables à profusion.

Applaudissements ou stylo, plus aucun jeu de paume ne m’amuse. C’est triste. Bon… voilà… il me semble que cet article est fini… Quoi la photo ? Si les toros sont imprésentables je ne vais pas illustrer l’article avec une photo de corrida… j’ai trouvé cette femme… qui semble être coiffée d’une montera naturelle. Fera l’affaire, malgré la ténuité du lien.

Ah au fait, 2021 devrait voir la sortie d’au moins un livre de votre chroniqueur haï… si inch Allah, Dios quiere etc… si la tauromachie existe toujours… covid-19… tout ça… une sorte de dico pour les nuls qui voudraient le rester… quelque chose comme ça… T’inquiète lecteur, on en reparle… je vais te sâouler avec ça… du marketing que ça s’appelle… teasing et tout et tout…et pointures associées…si on s’est pas fâchés d’ici là bien sûr… A plus, bises et postillons.

jeudi 17 septembre 2020

Le Bonheur des Uns...

Supposez qu’enfin vous révéliez un talent réel, que les portes s’ouvrent, les réussites s’enchaînent et que votre personnalité s’épanouisse, plébiscitée comme jamais. Vous pensez vraiment que cela va déclencher une joie sans borne chez votre conjoint et votre meilleure amie ? Ce serait mal connaître l’épaisseur et la complexité des sentiments humains.

Rappelez-vous les dernières remarques de vos collègues de travail, juste encaissées parce que vous aviez enfilée une jolie robe ou des talons hauts…  Alors imaginez maintenant qu’un succès important vous hisse très au-dessus de la gangue de médiocrité où baigne la plupart, où l’on vous trouvait si sympathique parce que si ressemblante au groupe…

Alors quand Léa, douce, belle, discrète, subtilement interprétée par la féminine, douce, belle, somptueuse (oui je suis amoureux) Bérénice Bejo décroche un contrat dans une maison d’édition prestigieuse, son technico-commercial de mari (V.Cassel) spécialiste de l’aluminium pour qui l’objet livre est un mystère, panique et perds pied : <<  Tu te prends pour Victor-Hugo ou quoi ? Tu veux te faire draguer par des intellos ? >> Comme si par cet acte, elle avait quitté son monde et son cœur.

La ‘’meilleure’’ amie, elle, surjouée par la caricaturale Foresti (ouais, non, pas amoureux…) d’abord incrédule puis moqueuse et enfin verte de jalousie et grise d’amertume, pousse le ridicule jusqu’à vouloir l’imiter, un peu comme ces gens qui pensent que photographier ne consiste qu’à appuyer sur un bouton.

Son mari (F. Damiens) s’avèrera le plus sain et le plus bienveillant des trois, malgré l’injonction qui lui est faite en permanence d’approuver sa jalouse.

Un autre succès, des hauts revenus, des dîners prestigieux, la fréquentation de gens intéressants, trop ce sera trop, Léa gagnera une vie plus riche que son précédent état de vendeuse, de la notoriété, mais perdra ses proches, décidément trop petits, trop étroits, trop mesquins, trop largués

Ce n’est donc pas quand ça va mal qu’on distingue ses vrais amis trop heureux de vous consoler, ce qui est rassurant sur leur propre sort, mais plutôt quand ça va très très bien…

Tel est je crois le message de Daniel Cohen par ce film.