mardi 29 novembre 2011
J'ai fait un rêve...
lundi 28 novembre 2011
Casas Grand Vizir de Las Ventas
Tu vois pas qu’il m’attaque aussi, lecteur ? La gloire, quasi !
Non, dans l’outrance, ce qui me ferait plus bondir c’est le titre du livre d’entretiens que sort madame :
''Femme de tête, Dame de cœur''
Du coup, instantanément, on doute du ''Femme de tête'' parce que, faut oser quand même !? Pourquoi je ne sortirais pas le mien, t’sais, lecteur, genre :
''Kiné de rêve, Bloggueur de génie y Aficionado de verdad'' ça en jetterait autant, non ? Sauf que tout lecteur complèterait de sa voix intérieure d’un laconique et désespéré et justifié « …et connard total… »
On ne peut pourtant pas suspecter qu’au niveau ''intelligence'' ces gens ne soient pas pourvus ? Non, non, c’est juste qu’ils flottent dans une stratosphère irrationnelle et cotonneuse en balançant doucement les bras pour ne pas quitter le courant ascensionnel. Vous savez les petits bonhommes de Folon sur A2 il y a déjà… des lustres… Ben, tout pareil… et de là-haut on leur apparaît comme des fourmis avec lesquelles ils ne peuvent avoir que deux types de relation : nous écraser du bout du pied ou nous ignorer en nous méprisant, dans les deux cas en nous ''avalanchant'' d’infos plus ou moins nœud nœud exactement comme si on était très très cons, même que ça doit être pour eux de la prétention qu’on essaye de prouver le contraire !
Bon enfin, y’a pas que le sexe dans la vie, y’a les toros aussi ! Un méchantas d’une demi-tonne qui ne transige jamais et ne t’explique qu’avec ses arguments pénétrants (rien à voir avec Hollande donc, si ce n’est le fanon… ) Et là, lecteur proprement médusé par ce blog, sois récompensé : désable tes portugaises, ouvre bien tes quinquets :
For the adjudication of las Ventas de Madrizzzzzzzz, the winner is :
Bernard-Simon Domb-Casas ! ... Himself...
Et là, peut-être te demandes-tu : est-ce aussi une outrance ?
Soit, tu le savais déjà lecteur... bon… tant pis, je continue :
Demain 12h à Madrid, se tiendra à l’hôtel Wellington une conférence de presse annonçant l’union Choperita-Casas-Matilla et la nomination de Simon Casas au poste clé de Directeur Artistique et de la Culture de Las Ventas.
Tu t’en fous lecteur, voire cela te contrarie que Casas, ton ''pays'' préside aux destinées de la Mecque. Ca y est, te dis-tu, les toros de Nîmes vont sortir à Madrid et tout est foutu… C’est le drame, et même ta Citrate de Bétaïne du soir ne parviendra pas à te faire digérer ça… Ne t’affole pas, malheureux… on peut suspecter Casas de beaucoup de choses, mais pas de méconnaître le milieu et les enjeux, l'attente de cette aficion. Alors moi, pour l’instant, je ne déprime pas, je ne condamne pas à l’avance, je reste ouvert et vigilant. Jusqu’à voir de quel breuvage il remplit son Graal enfin obtenu. Poil au cul, bien sûr, histoire de boucler la boucle de cet article.
jeudi 24 novembre 2011
Symbole de Bronze
mardi 22 novembre 2011
Subjectivité
PC sans PQ
En somme, ce que je me demande, c'est pourquoi le communisme est tant synonyme de blocage complet, pourquoi il n'arrive pas à engendrer la moindre évolution sans trahir ses idéaux ? Ou bien c'est criminel cette oppression d'un peuple ou bien c'est la preuve de l'aveu que diriger ainsi est une impasse.
vendredi 18 novembre 2011
Gina a lu pour nous :
La Tristesse des Anges
Roman de Jon Kalman Stefansson, traduit de l’islandais et paru chez Gallimard en 2011
Jens, le postier et « le gamin » chargé de l'aider, doivent délivrer le courrier dans les villages éloignés, au fond de fjords auxquels on accède en traversant le bras de mer, en contournant un cap ou en franchissant des terres, des landes, des montagnes. On s’enfonce plus ou moins, on s’épuise à se dégager, on se laisserait mourir, on ne voit pas les refuges, ni les maisons, ni le rivage quand on descend de sa barque, ni les précipices, ni les chemins, on tire sur la jument quand ses pattes s’enfoncent, on la déleste du poids de ses sacoches chargées de courrier, on se laisse emporter par un traîneau dévalant une pente. L’ épopée est d’autant plus pathétique que les deux protagonistes s’opposent par l’âge et la culture. L’un est fruste, pragmatique et silencieux, d’une rigidité très cartésienne, épris de liberté et d'indépendance. L’autre, adolescent de quinze ans est bavard, rêveur, curieux, amateur de mots, de poèmes, de chansons et de lecture.
Au cours des étapes, apparaît dans l’ arrière-fond tout un monde d’êtres faibles, alcooliques ou ivrognes, isolés et démunis car l’hiver est long, des veuves de pêcheurs et des orphelins, des veufs, des enfants maigres et bronchiteux, des mourants, des morts - comment les apporter au cimetière dans la tempête ? Ou, inversement, des nantis, des gens de pouvoir volontiers exigeants, cruels, abrités qu'ils sont des intempéries, de la maladie et de la précarité, que l’auteur aux idées sociales avancées fortement teintées de christianisme, pointe du doigt. C’est un notable qui exige que le courrier soit livré dans les temps ! Seul élément positif dans cette Islande des SAGAS où s'est maintenue une tradition littéraire d'origine celtique bien après que les bardes s'étaient tus dans notre pays, le livre n’est pas le privilège de quelques-uns, il est répandu chez le menu peuple des campagnes éloignées.
Les remarques du gamin naïf font surgir de nombreux et passionnants problèmes sur la mission des mots, de la poésie, des chansons, des questions qui traduisent l'éveil, l'étonnement devant la sexualité, la femme, l’amour tandis que se dégage une image véridique de la vie et de la condition humaine au point qu’on peut dire de ce voyage initiatique qu’il est la métaphore de toutes les vies. Difficiles, semées d’embûches à vaincre, de regrets, de sentiments de honte et de culpabilité, mais aussi embellies par le rêve qui est omniprésent dans la marche, l’endormissement, qui nous rapproche de ceux qu’on aime, de ceux qui nous ont émus vivants ou morts, fantômes qui parlent, conseillent, tant corps et âmes ne font qu’un. Rêve qui crée des flash-backs, des scènes parallèles, des restes d'insouciance, des visions d’été quand l’Islande est colorée, pleine de lumière et d’oiseaux.
Pourtant, finalement, au-delà de l’exotisme, même à travers la traduction, c’est l’aisance de cette parole écrite, moderne, vivante et poétique qui retient le plus l’attention. Les mots voltigent comme les anges floconneux, dans les extraits de poèmes, les réflexions nombreuses au « présent éternel » qui surgissent à chaque page au fil du texte, sans transitions, sans mots introducteurs si bien que le passage de l’abstrait au concret se produit en souplesse, les citations, sans guillemets ( un seul emploi, dans tout le roman), les dialogues (rares) sans tiret. La phrase se déroule en douceur, longue de ses nombreuses juxtapositions et c’est à pas feutrés qu’avance le lecteur dans les subtilités des métaphores empruntées à la nature et dans les allusions bibliques qui l’acheminent vers le message de fraternité final essentiel dans cette vie fragile inséparable de la mort..
Quand on pose l’ouvrage, on se demande depuis quand on n’a rien lu d’aussi beau..
GINA
jeudi 17 novembre 2011
Me Voy Paco...
Ce matin, Maravillosa a fermé la porte de la cuisine où elle reçoit quelqu'un. Elle en sort pour m'accueillir, en m'apprenant que Paco aujourd'hui n'a pas pu se lever et que s'il est prostré sur son fauteuil, c'est parce qu'elles l'ont levé de force, l'auxiliaire de vie, l'infirmière et elle. En poids et d'autorité, en bataillant un moment.
- jé né sé pas ce qu'il a, il né pé plou rien...
Je le rejoins tandis qu'elle s'enferme à nouveau dans la cuisine avec sa visiteuse dont le sac à main couleur aluminium et le manteau anthracite jonchent la table du séjour. Elle doit être jeune. Je perçois sa jolie voix dans cette langue espagnole qui me fait tant d'effet. Je n'ai jamais compris pourquoi. Qu'une Espagnole me parle et je la trouve immédiatement sympathique. Que j'entende parler une Espagnole qui me plait et je ne connais rien de plus érotique. Il y a dans ces intonations tout ce qui me plaît : de l'humour, de la joie, de la détermination, de la familiarité, de la sensualité et toujours ce petit côté « à moi tu ne la feras pas, je connais les hommes, je te vois venir de loin, caballero... » qui me fascine. Il y a souvent cette pointe de tenue, difficile à décrire, entre le dynamisme et l'entregent, je dirais, de la race. Oui c'est ça, j'assume mon racisme pro-Espagnole car si je lis la première définition que donne le Larousse pour ce mot :
« Idéologie fondée sur la croyance qu'il existe une hiérarchie entre les groupes humains, les ''races'' »
J'en suis et je t'emmerde humaniste mièvre et souffreteux de la sensiblerie. Para mi, la espagnola est hiérarchiquement supérieure aux autres en érotisme naturellement dégagé. Raciste pro Espagnole et pro raciste je suis. Et même racio-racialiste si ça t'indispose un peu plus. Cet érotisme, c'est sa ''race'' qui le lui donne, et bien sûr que chaque race véhicule des caractéristiques qui lui sont propres. Et de n'avoir pas ton aval parce que le principe te heurte ou te convaincre ou me justifier me soucie aussi peu que de te vanter les mérites de la tortilla de patatas bravas par rapport au gazpacho manchego. Celle que je n'ai pas encore vue, qui parle dans la cuisine avec yaya Maravillosa est de celles-là, j'en suis sûr. Son parfum flotte encore dans le couloir, et les intonations de sa voix m'électrisent tout comme le bruit de ses talons sur le carrelage.
- Bonjour senor, on va laisser les femmes à la cuisine hein, et en profiter pour faire du bon travail tous les deux...
Le vieux Paco ne répond pas, me décoche un regard terne, il n'est pas dans un bon jour.
On n'a pas besoin d'elles pour se mettre debout : je vous rappelle comment on fait... Avancez d'abord les fesses au bord du fauteuil, appuyez vos mains sur l'assise et surtout ne visez pas le plafond, plongez en avant comme pour basculer la tête entre les genoux et si les fesses ont décollé, ça y est, vous serez debout.
Une main derrière sa nuque et une attrapant la ceinture du pantalon j'accompagne le culbuto, il est debout du premier coup.
- Muy bien ! Allez ! On marche d'abord...
Des tours d'appartement, trois..., contrôle des embardées au demi-tour, sortie dans les communs, attaque de l'escalier, un demi-étage pas plus, juste de quoi lui faire remporter une victoire et requinquer le moral. Assis sur la chaise et je lui entreprends son épaule. La porte de la cuisine s'ouvre et une jeune femme déboule, me plante un clin d'oeil alors qu'elle m'aperçoit pour la première fois – vous connaissez des Françaises qui auraient fait ça ? - et tonitrue à mon patient :
- Me voy, Pacoooo ! Besitoooooos !!!
Vingt-cinq ou trente ans, élancée, à l'aise, elle lui parle à tout allure, lui dispensant de larges sourires inaltérables et communicatifs, Paco bée devant tant de vie et se laisse emporter par sa bonne humeur dévastatrice. Puis elle me tend une main fraîche et tonique et s'en va laissant retomber en rictus le sourire de Paco et la chape de silence du malaise conjugal dans le séjour mal éclairé. Et il est vrai qu'on se sent d'un coup un peu seuls.
- Cé ouna chentille tornade... elle vient de se marier...
M'explique Paco avec son regard désemparé.
- C'est vrai, elle est sympathique ! Et elle a l'air en pleine forme...
- Si ! Ma femme aussi elle é en pleine forme... cette nouit elle m'a dit qué jé pouvé crevé...
lundi 14 novembre 2011
Très Mauvaise Nouvelle
"Quand on part en quête du Graal, on n'emporte pas la poussette..."
Il me semble que sa jeune femme enceinte après ses "prestations Gore" de Madrid a dû lui mettre en main un marché qui ressemble à ça :
"Tu veux un enfant de moi ? Alors, arrête le toreo mon biquounet. Je ne vais pas le faire pour lui expliquer que j'ai laissé son père se tuer ou l'élever seule"
Ouais, parce qu'elle sont comme ça les meufs, maintenant, et t'as plus qu'à obéir beau mâle castré. Et n'oublie pas non plus de mettre les couverts au lave-vaisselle. J'annonce donc ici la subodoration personnelle d'un scoop coup-de-tonnerre : José Tomas .............................................................c'est fini !
Bon, en même temps, comme je ne suis pas un média taurin de référence, tout le monde s'en fout de ce que j'annonce, même moi. Mais bon, il n'empêche, c'est pour prendre date, si cela arrive c'est MÔA que je l'aurais reniflé prem's ! ça me fera une belle muleta, c'est sûr... Mais, bon, je suis joueur, je suis joueur ! Sans déconnar : esperar y ver...(pero ça ne rime plus, Maja Lola !)
samedi 12 novembre 2011
Six et cinq ?
Cela faisait bien onze heures que je dormais. Faut dire que la veille, j'avais éclusé onze Mojitos au Shoot Bar. Cela m'avait d'ailleurs coûté un bras, mais la serveuse était si jolie et si gracieuse que j'aurais eu l'impression de la décevoir si j'avais répondu « non » à ses sollicitations enjouées. Ça, c'est du personnel. Je dormais et je rêvais d'un type qui tournait la manivelle d'un panier à salade grillagé où dansaient des boules de buis numérotées devant un parterre de vieillards aux doigts crochus et aux yeux plissés. Crachotant dans son micro nasillard, il s'est soudain écrié :
« li cambe de moun grand : onze ! »
Puis, cette scène s'est évanouie et j'ai rêvé que je m'éveillais. Sur la table de chevet, le réveil à affichage digital indiquait de ses gros chiffres rouges aux contours encore flous, onze heures, onze minutes et onze secondes. Je me suis alors rappelé que nous étions le onze novembre 2011. Ça foutait la trouille. J'ai traîné ma carcasse jusqu'à la cuisine où la cafetière High-Tech m'apprit qu'elle venait de moudre pour moi onze grammes de café dans une tasse de, devinez combien ? Oui, onze centilitres. Là, l'angoisse montait peut-être bien jusqu'à onze sur l'échelle de Lexomil qui n'a pas plus de douze gradations. J'ai pris l'ascenseur quittant mon onzième étage – putain – pour rejoindre le petit marché de producteurs qui se tenait tous les vendredis sur la place... Pie XII. Ouf. J'avais lu quelque part que les brocolis renfermaient un taux phénoménal d'anti-oxydants dont on avait besoin pour paraître plus jeune, disons... onze ans de moins, à peu près.
Combien je vous en mets ?
Une douzaine, ça ira...
Je lui ai donné onze euros et j'ai attendu la monnaie en vain. Sur le chemin du retour, j'étais fort troublé car il m'a bien semblé que le type avait six doigts à une main... Me retournant j'ai compté les étals : il y avait onze marchands, que vous me croyiez ou non. J'ai relevé le courrier dans la boîte aux lettres. Il y en avait... une. Dans l'ascenseur qui me remontait à l'étage que vous savez, pris d'un doute, j'ai entrouvert le sachet de papier Kraft et compté les brocolis. Il y en avait onze. Suspicieux, j'ai appuyé à nouveau sur le bouton RDC que j'ai atteint en onze secondes pétantes. A la remontée itou. Mon Iphone a vibré, c'était mon ex-femme qui par SMS m'enjoignait de venir partager son horrible gâteau au yaourt qu'il m'avait fallu consommer onze ans durant, en n'omettant jamais de feindre de m'extasier sur sa texture « d'estouffagary » comme on dit sur la place Massena de Nice. Pour l'anniversaire de notre fils qui fêtait ses... oui, exactement. Cette perspective m’écœurait un peu plus mais bon, pour le petit, fallait y aller. A tous les coups il faudrait que j'aguante les regards en coin de ses trois copines abandonnées aussi par leurs mecs respectifs, qui composaient sa nouvelle famille dont l'occupation principale était de dauber sur les hommes, ces grands irresponsables partis pour de plus jeunes et accortes camarades de jeux. Enfin, ça, c'était la version sociétale communément admise. En vérité, si chaque fois qu'ils étaient rentrés fatigués, contrariés ou angoissés, elles avaient pris la peine de les sucer plutôt que de leur tirer une gueule de six pieds de long, rancunières et mesquines, elles auraient encore un mari.
La dernière relation sexuelle que j'avais eue remontait à onze mois. Une jeune femme pleine de vie, de onze années ma cadette, vibrante, gaie, insouciante, sensuelle, magnifique, capricieuse, jalouse et au bas mot, onze fois plus chiante que toutes celles que j'avais connues. Mais tellement vivante.
J'irais donc souffler les onze bougies avec Enzo devant le harpie-team. Je décidais d'y aller super sapé, rasé et parfumé par Guerlain histoire d'inspirer le plein épanouissement célibataire pour faire des envieuses. Machinalement j'ai regardé le road-trip du tableau de bord qui m'indiqua un truc que je n'avais jamais remarqué : elle habitait à onze kilomètres de chez moi. Elle commença par me reprocher mes onze minutes de retard tandis que j'eus la délicatesse de ne pas remarquer les onze kilos qu'elle avait pris depuis notre séparation. Je fus particulièrement gentil et distingué avec ses trois copines pour chacune desquelles j'eus un compliment ou un mot gentil ce qui l'ulcéra en silence. Elle me balança ma part de gâteau au yaourt ce dont je la remerciai chaleureusement sans y goûter. Je fus particulièrement paternel avec mon fils et agréable avec la plus jolie de ses amies à qui je fis sentir ostensiblement par quelques regards insistants que ses longues jambes parlaient à ma fragile condition d'homme qui n'en n'avait pas caressé depuis onze mois. Peu de temps après, au sommet de l'intérêt que les trois femmes portaient à mon discours spirituel et habile, je pris congé pour les laisser dans la banalité de leur terne après-midi matriarcal. Pour elle, d'un hochement de tête, pour les deux anodines, d'une amicale poignée de mes grandes mains toujours chaudes, tandis que je fis la bise à la surprise de la plus jolie en lui pressant le bras afin de fracturer quelque peu la magnifique solidarité fémi...niste, qui les unissait. Dans les yeux de mon ex-femme, onze balles traçantes de gros calibre luisaient. Au volant, sur le trajet du retour, la radio bien forte, j'ai chantonné tout au long des onze kilomètres qui me séparaient de mon appartement. Cette visite m'avait finalement comblé.
Chez moi, j'ai mis une version cubaine très langoureuse du fameux standard ''Besame Mucho'' , je me suis servi un vieux rhum de là-bas, puis j'ai allumé un module de « Romeo et Juliette » mielleux à souhait, aux effluves de cuir vieilli et aux notes empyreumatiques de bois tropicaux. Il n'y avait personne pour me reprocher de boire ou d'empuantir l'appartement, c'était bon. En suivant des yeux la première volute de fumée classieuse, il me semblait être aussi léger qu'elle. J'ai crapoté une ''onzaine'' de ronds de fumée, le plus récent traversant celui, plus élargi, qui l'avait précédé. Puis j'ai ouvert la lettre. Là, il m'a semblé que quelque chose clochait : un ami m'adressait un billet pour le France-Etats-Unis du soir-même au Stade de France. Il n'y avait que deux équipes qui s'y affrontaient... mais il est vrai que le football se joue à onze contre onze.
« Quine » a hurlé une castafiore au fond de la salle, en brandissant son carton.
vendredi 11 novembre 2011
Drive
Un thriller efficace, une bonne musique, plus douce quand frappe la mort, une bonne photo nocturne, un bon moment bien sanguinolent !
Les Connards :
Ben, les gens, la clientèle de ce genre de multiplexe, qui arrivent en retard en parlant aussi fort que dans leur cuisine, qui téléphonent, rient aux scènes tragiques, envoient des SMS bien lumineux dans la salle obscure, bouffent comme s'il y avait urgence à 22 heures, des friandises en faisant crisser des papiers "de longue"... bavardent sans arrêt... bref, qui chient sur l'oeuvre du réalisateur, conchient sur l'atmosphère qui devrait prévaloir avec ces films, défèquent sur le respect qu'ils devraient à la communauté, emmerdent, quoi. Même que parfois, t'avais envie d'enfiler le blouson scorpionné et de taconear les faciès (je rassure les lecteurs : pour une fois bien blancs et bien français de souche et de racines, les emmerdeurs) Ils viennent voir Drive mais n'ont aucune idée de la conduite intérieure, sont cabriolets du cerveau.
J'ai vieilli ? Sûrement. Ca revient au même. J'ai pas tenu longtemps, je me suis retourné et j'ai demandé : ça va durer pendant tout le film ? Coup de bol, je ne me suis pas fait lyncher ; d'ailleurs la preuve, sinon votre resena de ciné, couïc...
mercredi 9 novembre 2011
Chanson Clown Bi-Fluorée
Ouais... relisez, parce que même moi qui l'ai pondu, je trouve cette phrase assez compliquée...
Il me semble qu'avec un petit effort d'honnêteté intellectuelle, il est quand même bien plus sain, plus éthique, plus juste, de permettre à un animal au faîte de ses capacités, de combattre, de lui dire "Va, maintenant qu'on t'a sélectionné sur tes caractéristiques d'agressivité, maintenant qu'après des années de liberté sauvage, tu es musclé, armé, dangereux, va, montre-nous comme tu es fort, comme tu combats, dans la pleine éventualité d'ôter la vie à ton adversaire" plutôt que d'inviter un fauve inaliénable à partager trois mètres carrés avec deux de ses congénères alors que dans la nature chacun d'eux a besoin de centaines d'hectares pour survivre. Ce n'est quand même pas une provocation partisane de constater ça ? Et ce ne sont pas les panneaux accrochés aux grilles des cages assurant que du poulet bio et du boeuf non hormoné leur sont servis deux fois par jour qui rassureront la race humaine de son innocence, si ? Vous pensez comme ça ? Pauvre de vous ! Dégénérés du raisonnement, déficients de la logique, altérés de la sensibilité !
Dans un cas, toute la condition, la nature profonde d'un animal est niée, incapable qu'il est de bondir ou de courir après ses proies, ayant tout juste la place de s'étirer, dans l'autre le théâtre révélant ses qualités est organisé pour le vénérer, en le magnifiant tel qu'il est. La différence est totale, fondamentale !
Alors clowns zantis de tous les pays, qu'attendez-vous pour :
"ouvrir ouvrir la cage aux fauvios/ les regarder vous griffer c'est bô.../ les zantis si vous voyez/ des gros chatons prisonniers/ ouvrez-leur la porte vers la libertéééééé... tous en choeur... bis repetita... ouvrir, ouvr....
Cet après-midi là où je m'étais déplacé jusqu'à ce cirque parce que je trouve que c'est un très bon thème photographique que je voulais commencer à exploiter, j'ai raté la photo la plus spectaculaire. Je venais de tourner le dos aux fauves et je photographiais une danseuse - eh oui un peu de douceur dans un monde de fauves ne nuit jamais - quand d'énormes rugissements retentirent : deux tigres, debout sur leurs postérieures s'avoinaient méchamment à coups de pattes propres à assommer ces gentils animaux qu'adulent et dont se nourrissent les zantis - les boeufs - à qui ils ont quand même permis qu'on coupe les roustons... (les roustons, madame ? il s'agit d'une charmante locution argotico-pittoresque désignant deux adorables petites sphères viriles à ne toucher qu'avec d'infinies précautions svp et seulement sur autorisation expresse bien sûr...)
Il m'est apparu à la faveur de cette bagarre, que si la première torture est la captivité et la deuxième, la privation d'espace pour s'ébattre, (comme qui dirait le pendant de la contrainte d'espace réduit pour se battre...) la troisième certainement la promiscuité, l'impossibilité pour des fauves de laisser s'accomplir le jeu naturel de la hiérarchie avec son lot de comportements codifiés comme la fuite, l'inhibition ou, obligés à la confrontation, la lutte.
Au campo bravo, dans les cercados à condition qu'ils soient justement assez vastes, s'observe une naturelle sauvegarde des uns et des autres même si des combats sont inévitables, où le plus souvent, les lieutenants s'écartent quand le capitaine vient vers eux, en prenant bien garde de ne jamais laisser une distance qu'eux seuls estiment et connaissent, s'amenuiser entre eux. Là, ces pauvres tigres condamnés à ne jamais défouler leurs masses musculaires, à l'instinct de solitaires dominants, sont condamnés à se subir les uns les autres et donc à la baston. Pour comprendre mieux, prenez Zocato, Viard et Klein et enfermez-les dans un chiquero : ils auront beau manger du poulet bio tous les jours...
PS : Mesdames, 'tention... attendez les permissions...
PPS : Ce qui est bon dans le fait de déconner au milieu d'un article sérieux, c'est qu'un type triste comme Richier ne viendra jamais se commettre a déposer sa prose ici... c'est si bon de le laisser à Xavier...
PPS : Richier, si tu viens ici ce coup-ci, je te censure, on le saura même pas que t'es venu... Bouaaaaah....blblblblb vade retro... tristanas...
Pour les commentaires...
Pour lui, donc, ou elle - mais en principe n'étant pas homme politique je n'avais pas besoin de préciser - je l'affiche à nouveau !
lundi 7 novembre 2011
SOINS A DOMICILE III
- Fermez la main gauche, allez… un effort… je sais que vous pouvez y arriver, faites comme s’il y avait un billet de 500 euros à attraper…
Francisco bouge enfin, mais de partout sauf de la main gauche, secoué qu’il est par son rire. Il ferme la main droite pour me montrer que de ce côté-là, il peut… ce qui par ricochet est chargé de me faire comprendre que c’est pas la peine de lui demander du côté où c’est difficile, juste pour l’emmerder, vu que s’il pouvait, il a bien compris comment il ferait… et que si j’avais seulement la bonne idée de le lui demander du bon côté, nos rapports seraient plus consensuels et la vie plus facile.
Asuncion est sur le départ, elle s’affaire, tournant en rond dans l’appartement en vérifiant que ce qu’elle a déjà mis dans ses poches n’est pas oublié dans quelque tiroir de meuble marron foncé torsadé style ''Controverse de Valladolid''. Dans sa chambre tout est bien à sa place, les poupées espagnoles, les bibelots kitchissimes et la lampe de chevet en velours rose et franges de soie. Dans celle de mon patient, par contre, a sévi un autre décorateur du nom de ''Bastide Médical''. L’inox et le polyméthacrylate de méthyle ont remplacé le bois et le velours et le petit fauteuil a cédé sa place à un trône nocturne tout de métal et de skaï revêtu, installé au cœur de la chambre pour l’apport progressiste de son tiroir à déjections. Cool. ''Médicalisé'' que ça s’appelle.
Asuncion claque la porte. Francisco vérifie d’un regard circulaire qu’il ne s’agit pas d’une fausse alerte et qu’elle est effectivement sortie, puis me lance :
- Elle é beaucoup fâchée avec moi, en cé moment… zé pé plou rien dire…
dimanche 6 novembre 2011
Balada Flamenca : Livre Référence
Ayyyyyyyy...
Marc m’a sollicitée pour une reseña sur ce livre et je ne me suis pas faite prier tant j’adore son thème et apprécie la plume de Ludovic Pautier ainsi que son émission radiophonique Falseta que j’écoute régulièrement. Je connaissais moins Jean-Louis Duzert dont les photos ont été ici une vraie révélation.
Inutile de dire qu’une telle reseña s’est avérée pour moi une mission délicate. Car comment résumer (le mot déjà est réducteur) l’expression aux mille facettes de cet art porté et transmis ici de manière magistrale par deux poètes qui ne font qu’UN tant l’osmose est totale entre l’œil du photographe et l’érudition flamenca de l’écrivain ?
Et là, je dois l’avouer, livre en mains, tranquillité dominicale, confort de mi mecedora, j’ai pris un plaisir extrême à découvrir ce livre.
Ce n’est pas une nième histoire des origines du flamenco : pas de description didactique des palos ni de jugement porté entre flamenco puro, jondo en opposition au flamenco moderne plus ou moins novateur … C’est un livre généreux imprégné de l’amour du flamenco qui anime ses auteurs, et de l’envie de transmettre, de « passer ».
Auteurs qui semblent vivre et respirer le flamenco par toutes les fibres de leur corps … ils sont eux-mêmes « flamencos » ! Sans racines gitanes, sans culture andalouse, ils ont été touchés par la grâce du duende à un point magistral.
De la photo de ces belles et mythiques mains de Camarón à ces visages de cantaores déformés par une douleur éructée mais qui transforme l’expression de leur visage en absolue beauté, en passant par cette Rocío Molina faisant corps avec son mantón de manila dans un mouvement fascinant bras levés vers le ciel, le regard reste séduit.
D’autres photos impriment ma rétine : le christique et beau Joaquín Cortés (danseur si décrié par les puristes), María Pagés, de dos, dans une harmonie corporelle des lignes extraordinaire, las batas de cola …. et tant d’autres instants saisis dans des lieux éloignés mais pourtant si vrais et intemporels : la magie du flamenco qui devient un code universel ?
Ludovic Pautier écrit : « le particularisme du flamenco tient à ce qu’il mêle progressivement les impétrants et les habitués ». C’est tout à fait vrai. Et lorsqu’on réalise que sans être hispanisant on arrive à recevoir le choc émotionnel de cet art, on comprend la force profonde, puissante, tellurique qu’il véhicule. Encore faut-il avoir cette sensibilité qui est propre à tout être à la recherche del arte et son envie d’y entrer et de « communier ».
Balayant d’une phrase le flamenco pour touristes fabriqué et vinylisé dans les années « costa brava », Ludovic Pautier nous ramène à l’essence pure. Pas seulement celle qui émane d’un llanto, d’un jaleo, mais aussi aux lieux qui les produisent et qui les magnifient. Car le flamenco requiert des lieux d’écoute, des atmosphères : « Il aime les patios de voisinage …. le cercle qui nous met entre soi, la fumée, les verres … quand toute la machinerie et ses artifices s’estompent, la profondeur reprend ses droits … » (sic)
Comme c’est juste. Et comme je regrette, lors du Festival de Nîmes, que ces « messes » se déroulent dans ce grand théâtre ou des lieux si conventionnels. Le prix à payer pour diffuser au plus grand nombre bien sûr et ne boudons pas notre plaisir …. mais les jaleos, les arsa, asi es et autres gritos que l’on aimerait lancer dans le feu du spectacle se figent dans la gorge tant le lieu ne « donne » pas …
Livre à garder à portée de main pour le plaisir de le compulser au hasard des pages et à offrir à ceux que l’on souhaite initier …. Pour ceux qui aiment déjà le flamenco, un livre référence.
Bellisima balada flamenca señores……
Camarón me acompañó ……… « Pa qué me llamas prima …. » y le respondió Mayte Martín con su « Vidalita ».
Maja Lola
samedi 5 novembre 2011
Qu'est-ce qu'une bonne photo ?
De nombreuses personnalités du monde de la photo viennent donner leur réponse à l'énigme : Qu'est-ce qu'une bonne photo ? De la plus vulgaire, celle de Alain Paviot galeriste : "Une bonne photo est une photo vendue..." à la plus courte de Klavdij Sluban : "c'est une photo qui rime" à la plus exigeante de Brassaï : "Pour moi, il n'y qu'un critère qui permette de dire qu'une photo est bonne : qu'elle soit inoubliable". Parfois, pour ceux qui s'occupent non pas d'une photo mais d'auteurs et d'oeuvres, cette question n'a pas de sens. Agnès Sire directrice de la fondation Cartier-Bresson : "C'est une question qui ne me vient jamais à l'esprit. Pour moi une photographie s'inscrit toujours dans une oeuvre. Bien sûr, si l'on pense à l'illustration, la question est différente car il s'agit là de savoir si l'image remplit sa fonction pour le media qui va l'utiliser. Mais il est plus intéressant de ramener cette question à la fabrique de l'image pour son auteur, de comprendre la place d'une image singulière dans un ensemble et de juger enfin, de façon parfaitement sensible, si cette photographie est un maillon indispensable ou superflu. Il n'y a pas de norme, seulement une justesse par rapport à un propos" Alors ? Vous courez au tabac-presse pour l'acquérir ? Une petite dernière pour la route alors, de Claudine Doury photographe : "C'est une photo qui porte en elle quelque chose de mystérieux, d'indéchiffrable et qui, telle une Joconde, ne cesse de nous interroger". Ah au fait, et ma définition à moi elle vous intéresserait ? Parce que je crois que j'ai trouvé... Pour moi, une bonne photo c'est celle à laquelle j'ai réfléchi, que j'ai déjà vue mentalement, dont le projet a excité ma pensée.... C'est avant tout une photo que je n'ai pas faite. Soit parce que je sais n'avoir pas la compétence de la mener à bien, soit parce qu'il faudrait réunir des conditions de temps et de disponibilité que je n'ai pas. Ce doit être pour ça que je continue à faire de la photo, pour m'approcher d'un but inatteignable.
Il est très bien le fauteuil de la grosse dame chulo, tu ne le trouveras pas à Conforama, celui-là.
jeudi 3 novembre 2011
Parenthèse Orientale
Puis un jour d’oisiveté, de curiosité, la décision est prise … elle pousse la porte.
« Bonjour. Quelle est votre pointure ? »
Et l’hôtesse lui remet une paire de sandales de plage.
Coup d’œil circulaire …. Décor d’orient, faux moucharabiehs en pur matériau synthétique, tables basses « marrakech » où s’étalent des théières argentées ouvragées, multiples tapis colorés, miroirs shéhérazade, salle d’attente, sas de décompression avant le passage dans l’arrière salle ….
Mais il faut encore sacrifier à l’étape suivante, moins exotique : vestiaires très piscine municipale où l’on se déshabille, se démaquille pour se dépouiller de tout ce qui peut faire obstacle à l’exposition du corps à cette vapeur intime, bienfaisante et complice.
Traversée d’un salon où des nattes moelleuses attendent les corps qui voudront bien s’abandonner, plus tard, quand ils leur seront rendus détendus, lascifs et consentants.
Soudain, la peur de la nudité la terrorise. Et si elle était la cible des regards ? Non, elle n’a pas honte de son corps mais cette exhibition soudaine la paralyse. Ce lieu l’intimide.
Mais, curieusement, dans l’atmosphère douce, ouatée, entourée de ces femmes qui lui semblent tout à coup complices, elle lâche prise et se défait de sa serviette.
Apparaît la salle des ablutions. Début du rituel ….. Elle se oint d’un savon noir pâteux qui glisse sur la peau mouillée, s’immisce dans tous les creux, les pores … puis elle pénètre dans l’antre, le cœur du volcan : salle ouatée, bruits étouffés, vapeur légèrement odorante, carrelage blanc immaculé, soleil qui tente de percer à travers un vitrage martelé opacifié par la moiteur ambiante. Il n’y a plus qu’à fermer les yeux, lâcher prise, se laisser saisir par cette chaleur humide à la fois douce et violente, apaisante et stimulante au gré des entrées en force de jets de vapeur, comme des attaques sournoises et intempestives d’un volcan invisible et capricieux.
La léthargie et l’abandon à ses songes sont interrompus par ces tempêtes, parfois si denses qu’il devient impossible de rester plus longtemps dans la pièce …. Une sortie précipitée devient urgence. Une fois, deux fois encore, elle affrontera l’orage brûlant mais captivant, cette morsure de la chaleur qu’elle réussit à dompter.
Puis le massage râpeux de la Loofa la réveille, l’étrille, la purifie. Moment de stimulation que couronne une douche froide vivifiante.
« Votre thé à la menthe, avant ou après le massage ? »
Avant. Elle a besoin de reprendre ses esprits, de se situer dans cet espace inconnu et intemporel, de revenir sur terre.
Abandon sur une natte moelleuse, dans l’attente de l’huile parfumée qu’elle sent couler sur le corps.
Le massage commence. Des mains féminines et complices, des mains auxquelles elle s’abandonne sans équivoque, en confiance, en toute connivence. La détente est totale, le « voyage » se poursuit. Pas envie qu’il s’arrête. Elle sourit : « Je dois avoir du sang maure, juif, chrétien … « se dit-elle en se souvenant de ses racines andalouses. Sept siècles ! Sept cents ans de cohabitation harmonieuse où mosquées, synagogues, églises étaient nombreuses dans son Andalousie, où les échanges humains, culturels, se produisaient en toute tolérance, où la créativité musulmane avait laissé des trésors d’architecture merveilleux, démonstration de ce que les hommes savent bâtir avec génie et beauté.
Manuela ferme les yeux. Le massage est long, doux, professionnel … Ses pensées semblent comme perdues dans cette moiteur, le cerveau ne répond plus. Ce doit être cela qu’éprouvent les gens qui expérimentent la fameuse « sortie du corps ». Corps abandonné dans l’intemporel … chaque geste de la masseuse lui rappelle une main amoureuse, une caresse oubliée qui devient presque « ressentie ». Oui, elle se remémore d’autres instants … il caressait ce creux de reins, sa main ralentissait pour s’attarder sur les fesses, caresse ronde, douce, chaude …
« Vous vous allongez sur le ventre ? »
Son regard s’attarde sur les femmes qui l’entourent. Aucun signe social distinctif. Corps nus et anonymes, tous à la recherche du bien-être et de la parenthèse enchantée du lieu. Seins lourds ou à peine esquissés, largeur de hanches, croupes puissantes et voluptueuses ou bassins étroits et androgynes … chaque corps « parle », chaque courbe évoque une histoire, un poème, un âge pas toujours définissable … Quelle importance ? Elle se prend au jeu de l’imaginaire et réalise le plaisir éprouvé à cette observation sans aucune arrière-pensée. Elle aime, sans ambigüité, le sexe opposé. Mais le trouble qui s’empare d’elle, ce bien-être, ne sont-ils pas en réalité les signes d’une irrémédiable et incontrôlable reconnaissance des êtres de son sexe. Union sacrée, complicité mythique de toutes les femmes ? Amies, inconnues, dans ce gynécée où toute la connivence et la générosité féminines se dévoilent, où confidences, conseils, consolations, solidarités, deviennent leur force et leur courage ?
Elle les observe. Femmes musulmanes, européennes, tous âges confondus, mères, épouses, amantes. Pas de discrimination, ni racisme, ni différence sociale : femelles, lascives, complices, rieuses, rêveuses, posées.
Le temps s’est à nouveau arrêté. Elle ne sait plus où elle se trouve. Comment expliquer ces picotements soudains sous la peau, si doux, comme des milliers d’ailes de papillons qui l’effleurent, ce petit courant qui parcourt ses reins, cette chaleur soudaine entre les cuisses qui remonte et se glisse plus haut, dans un lieu dédié à d’autres visites, d’autres honneurs, d’autres caresses ?
La raison n’est plus là. Plus question de convenances, de contrôle, de maîtrise … Livrée à qui ? Consentante à quoi ? Questions inutiles. La sensualité du lieu, la complicité virtuellement rassurante de ces femmes, la détente, l’émotion profonde de ces instants, le corps purifié et offert, tout concourt à faire exploser et s’épanouir ces sensations.
Tout naturellement elle pense à la burqa : ces femmes enfermées dans leurs tombeaux de bure donnent une image tellement triste et vide, tellement éloignée de ces libertés du corps exposé objet de tant de soins.
Faut-il que le vêtement protège, masque, enferme, pour mieux libérer le corps dans l’intimité ? Pour mieux le faire exulter avec raffinement ? Ces femmes musulmanes, dans l’intimité la plus cachée de leur hammam compensent-elles l’aliénation de leur soumission vestimentaire ?
Rhabillage au ralenti de Manuela. Ses gestes sont lents et calmes, chaque vêtement reprend sa place.
La rue bruyante, l’agitation, les embouteillages l’attendent … qu’importe : elle a repris sa voiture calmement, sereinement …. Un feu rouge la stoppe. Elle se sent bien … un jeune homme dans sa voiture arrêtée la regarde et lui sourit … oui, elle se sent bien.
Manuela appuie sur “Play”…. « Fly me to the moon » chante Sinatra. La vie est belle !