jeudi 22 mars 2018

Avant 14 ans pas de corrida ?


Les psychiatres et les philosophes peuvent bien s’entre-dévorer à coups d’arguments pro et anti sur la proposition d’interdire le spectacle de la corrida aux enfants au motif qu’elle serait préjudiciable en dessous de leur 14 ans, nous ne sommes pas dupes. Nous qui l’avons découverte avant cet âge, savons bien qu’ils n’y a pas de danger traumatique à y assister. Au contraire, (‘’a contrario’’ eut été plus chic mais aurait induit l’idée d’un latinisme distingué dont une seule année d’initiation ne permet pas de se prévaloir) la révélation de la détermination jusqu’au-boutiste d’un homme face à ce qui est plus lourd, plus rapide et plus armé que lui, est sans doute d’une immense valeur éducative et doit leur en boucher un coin à tous ces petits merdeux (ouais oh, ça va, hein… arrêtez de les surprotéger, ils ont vu Game of Thrones j’vous signale, scotchés sur leurs smartphones…)

Déclarer vouloir les protéger est une hypocrisie, on ne se protège pas de la vie, on l’affronte, tout au long de son chemin, dans tous les domaines. Seulement voilà, et c’est à mon avis le vrai problème qu’ils cherchent à contourner, les émotions de l’enfance sont connues pour perdurer, indélébiles, au plus profond du cerveau, qui est neuf, tous ses neurones intacts, imprimant des images claires et précises. A l’opposé du vieil aficionado si imbibé de Ricard qu’il ne sait plus pourquoi il paye pour voir des toritos trottiner dans l’amphithéâtre…

Le danger est alors plus grand que le goût soit pris, plus ancré, et ne s’évanouisse jamais (un peu comme un jeune cheminot cégétiste heureux d’inaugurer son premier CDI par une grève avant d’avoir transpiré sa première goutte. Si… ça vous fait du bien de lire des trucs pas consensuels… surtout depuis que Macron a atomisé les Trotskystes, les Skinheads et les eunuques du centre)

Donc, j’ai collé un adhésif ‘’toro’’ sur le biberon de mon petit-fils – ah ben oui…- qu’il ne découvre que lorsqu’il a fini son bib de salmonelle ou de lait de vache bio tout aussi nocif pour son futur. Et là il est content, et moi aussi. Olé.

mardi 20 mars 2018

Attention Western


HOSTILES de Scott Cooper



C’est un Western lent, profond et majestueux. Où les hommes sont frères mais ne le savent pas encore. Où les chevauchées au long cours se font au pas lent, celui de la réflexion, des prises de conscience, des remises en question et des dos éreintés. Il faut dire que durant le dernier quart de siècle, on n’a pas cessé de s’entretuer.

De se scalper, de s’égorger, de s’émasculer, de s’ouvrir en deux. Au sens propre, malgré les salissures. On a massacré toujours plus, massacré des hommes, massacré des femmes, massacré des enfants, sans distinction, gratuitement, à Wounded Knee ou ailleurs, par désir d’hégémonie, pour la conquête de l’Ouest. Alors comment l’ouverture à l’autre pourrait-elle être facile et rapide… ce n’est pas possible.

Pour que ce capitaine des tuniques bleues et ce chef indien puissent se comprendre et se respecter, il va falloir deux ingrédients : du temps et du partage d’événements forts. Justement, the president of America himself, ordonne la libération de ‘’Faucon Jaune’’ (qui a quand même plus de gueule en ‘’Yellow Hawk’’) et son rapatriement en sa terre natale du Montana par le capitaine bleui.

Or, comme on l’a dit, la route est longue, le pas des chevaux lent et l’hostilité grande… et, dommage traumatique collatéral, il devra s’encombrer d’une veuve dont la famille vient d’être décimée qu’il ''déchoquera'' progressivement avec une grande délicatesse.

Il faudra bien deux heures trente de film égrenant comme tout bon Western, son lot de silences qui en disent long, de discussions qui en avouent peu, de paysages panoramiques et de bivouacs, pour arriver à confesse – je pèse mes mots -. Problème : la route n’est pas sûre, engendre les drames au fil des miles, les Comanches pour tuer, ne sont pas les plus manches, et les balles, elles, fusent toujours à 600m/seconde vous rattrapant sous la pluie glacée comme sous le soleil âpre.

Dans ces conditions, mourir, ne serait-ce que, sereinement dans la terre de vos ancêtres, s’avère assez illusoire. La mission une fois à son terme, chacun, du peu qui reste, suivra sa voie, ferrée pour la jolie veuve que le cheminot aura le privilège perpétuel de transporter, tandis que la tunique bleue pour une fois en civil sur le quai, la regardera peut-être partir comme une vache un train, comme tout cow-boy violent et asocial qui se respecte, solitaire, étranger au mouvement perpétuel qui l’entoure ou… peut-être pas.

Once more time, ces Américains, à grands coups de paysages époustouflants et en faisant appel à nos émotions primaires, réussissent encore à nous émouvoir. Passage obligé ce week-end pour les amateurs de westerns, d'autant qu'il pleuvra sur la ville aussi dru que l'adversité sur les hommes de l'Ouest.