mardi 25 juin 2013

Saint-Gilles, primeurs 2013

Saint-Gilles. Sa feria de la pêche et de l'abricot. Eh oui, là-bas on donne dans le fruitier. Son canal à péniches, ses house-boats à Belges brûlés, son bar à coquillages bondé, son marché et, au bout du cours où il se tient, ses arènes de béton désertes le matin ; enfin, sa rue principale qui file droit vers la Camargue proche où paissaient non loin les novillos – plus près des deux ans – de La Paluna qui courent la non piquée du jour. Les absents peuvent regretter leurs huîtres.
J'ai raté le premier qui s'avéra parait-il moins bon, mais pour les trois qui suivirent, ce fut un plaisir de constater leur combativité piquante, leurs répétitions à l'envi, leur grande mobilité, le tout avec l'embestida noble qui permet : que demander de plus ? Devant, un Soto pas soso et un Husson sur le taf inspiré. Les combats, car il s'agissait bien de cela, soutenaient constamment l'intérêt par leur indécision, les novilleros maîtrisant tantôt leurs séries avant que d'être débordés par la caste de bestiaux que les présents étaient curieux de retrouver toros. Nous partîmes de l'arène avec la pêche, s'arrêtant trois mètres plus loin à la buvette accolée où rincer la poussière du gosier d'un pastis surdosé dans un gobelet de plastique trop mou...

Petite déambulation ensoleillée le long du canal jusqu'à un restau qui nous servit une ''tomate-mozza'' d'une lignée de desecho baignant dans une mousseline industrielle, dont tout le monde se régala sauf vôtre serviteur qui en avait il est vrai, juste la veille au soir concoctée une avec la Mozzarella di Buffala du fromager MOF des halles (Vergnes, meilleur ouvrier de France version fromager-affineur) avec des tomates offertes par un producteur de village à son infirmière préférée dont je partage avec lui le zèle professionnel – sauf que je fais encore ma toilette tout seul...- le tout sur une liche d'huile d'olives de variété Négrette du moulin Paradis saupoudrée d'origan, basilic et olives niçoises et il y avait alors autant de différence de raffinement entre ses deux façons, qu'entre la couche absorbante smokée bi-ouate de Jeanne Calment (paix à son... enfin, son âme) et une culotte ''La Perla'' brodée de soie sauvage et rubans... ma modestie dût-elle en souffrir. 
 
On enchaîna par une ''morue-aïoli'' trop plate et triangulaire pour être honnête et pas assez relevée pour brûler les papilles et générer quelques retours de flamme roboratifs pendant la course à suivre, ce qui permet de n'avoir point de voisins trop collants. Un point de vue qui se discute quand vient s'asseoir tout près, une belle Arlésienne dont les mèches de cheveux peignées par les rafales d'un ventas intempestif, viennent soudain titiller vos naseaux dilatés de bonheur à sniffer le remugle exotique des champs de vanille de Madagascar, tout comme votre imagination fertile, toujours prompte à galoper vers les rivages sucrés des danses tribales suggestives de l'île aux Baobabs...

Le premier Baltasar Iban Valdès qui nous fit coucou était trop ''schmoll'' du squelette et pas assez tonique des muscles striés pour nous impressionner. Le reste fut plus costaud, bien âgé – cinq ans et huit mois – et sérieux, mais pas très héroïque à la pique à une exception près. Dans ce contexte, Camille Juan dont c'était le seul contrat de l'année ( ! ) peina à trouver sa place et se mit parfois en grand danger. Mais qui pour lui jeter la pierre ? Je ne vois pas... Maintenant, s'entraîner dur pour ne faire qu'un contrat de réel danger sans qu'on puisse le lui reprocher en raison d'un courage avéré mais dont les qualités artistiques et techniques sont insuffisantes pour justifier de déplacer un public … Voyez un peu la vis sans fin de cette problématique... Je serais sa femme, je sais bien ce que je lui dirais :
  • Allez zou, c'est pas un peu fini de faire le ''Fantasmatador'', maintenant ? Je te signale que tu n'as toujours pas réparé les étagères du garage... !
Et alors il deviendrait mieux qu'un torero, un héros déchu dans un recueil de nouvelles, parmi tous ceux qui auraient voulu mais n'ont pas pu... ( paru chez Cairn )

Ferrera eut des problèmes de communication avec le public Saint-Gillois ainsi qu'avec ses toros... du déchet, de l'approximation, du refus, de la maladresse.

Castaño avoua ses limites et comme on ne ''s'estrasse'' vraisemblablement pas devant l'arène très bien garnie d'un pueblo, comme dans la nîmoise, le retentissement n'étant pas le même, il confia à sa cuadrilla le soin de réchauffer les gradins. Une très grande paire de Sanchez, vous savez avec sa course lente dite du ''Forcados coxarthrosique'' à la tête du toro, mais las, le prix au meilleur banderillero fut attribué par les connoîsseurs du cru à David Adalid, on suppose parce que son nom a plus surfé sur la vague de la popularité ? Quant au prix de la meilleure pique il aurait été déclaré ''prix de la moins mauvaise pique'' ou ''desierto'' qu'il n'y aurait rien eu à redire...

Un matin qui donne la pêche, donc, avant l'après-midi des noyaux d'abricots à avaler. Une bonne journée d'aficion.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Pourquoi vont-ils voir des corridas ?
Pour bouffer des abricots et de la morue. C'est d'une simplicité ! A désarmer le plus virulent anti-taurin et à couper le sifflet au philosophe le plus bavard.
Quand on était petits, on faisait des sifflets avec les noyaux d'abricots râpés des deux côtés sur le ciment du balcon. Plus tard nous sommes passés aux morues, fades ou piquantes.
Quand on était petits, presque au moment des vendanges, on cueillait au bout des rangées, des pêches de vigne à la chair blanche persillée de rouge et de rose.
Blanc, rouge et rose, comme le front républicain. Baoum !
JLB

Anonyme a dit…

Il n'y aura désormais plus personne pour montrer son cul au public qui le siffle.
Jack Cantoni est décédé.
Génial joueur du grand club de rugby de Béziers et vrai aficionado a los toros. Banderillero ou recortador des pelouses, il incarnait le rugby que nous adorions.
Je me rappelle les nuits de poker sous le café toulousain de son père Vincent. Je me rappelle, chez Jack, une soirée d'après corrida à Béziers avec Jean-Claude Boutier et Jean Cau. Je me rappelle le jour où j'avais marché sur un pied d'Armand Vaquerin...
"La truite" n'avait pas la langue de bois, c'était un vrai "mec" mais il s'est décroché du fil de la vie beaucoup trop tôt.
Un dernier crochet qui nous laisse encore une fois sur place et hop... salut Canto !
JLB

Maja Lola a dit…

Bien vu sur les faenas ... un des conseils que tu suggères a déjà été donné il y a peu au maestro en question. Mais une passion si dévorante n'admet pas l'objectivité.

"Ici nous sommes dans des arènes de 3ème catégorie" ... a lancé un spectateur ...

Devant la mauvaise humeur de Ferrara j'ai pu constater que les commentaires de certains spectateurs étaient aussi de 3ème catégorie ! Et peut-être encore plus hauts dans l'échelle de la c....rie

A part ça, je comprends maintenant pourquoi tu avais un banc pour toi tout seul ;-)

Anonyme a dit…

question de curieux qui écrit aussi : au sujet de ton "husson sur le taf"... as-tu en écrivant cela cherché à trouver le pendant phonétique du "hussard sur le toit" ?

Marc Delon a dit…

bingo !