samedi 6 février 2010

Le Divan de Raoul

Si on est aficionado a los toros il faut connaître Raoul. C'est un type comme seul l'art tauromachique peut en produire. Physiquement il se rapprocherait d'une hybridation coupable entre Vercingétorix et José Bové moustache comprise, alternant de doctes postures à la Panoramix le Druide, mais aussi de jouissives espiègleries comme Astérix. Enfin il est gaulois quoi, pas de doute. Il est pénétré de quelques idées fixes (il ressemble même un peu à Idéfix, je trouve, quand il rit... mais il n'aboie jamais) parmi lesquelles le militantisme pour l'abolition de la notion selon lui dépassée et clivante torista/torerista dont il se bat les jarrets avec force désinvolture. Lui, qui sait tout de Bergamin et de Raphael Alberti, c'est de l'art tauromachique dont il veut parler.
Raoul, nom d'artiste Raul, connait l'Andalousie comme sa poche, collectionne les anecdotes tauromachiques savoureuses et si on arrive à le motiver à coups de manzanillas au comptoir d'une bodega de Triana, il compte parmi ces aficionados capables de vous emmener au bout d'une nuit mémorable. Ces fameuses nuits qui comptent tant dans la vie d'un aficionado. Ces nuits imbibées, rigolardes, fatigantes de stations debout prolongées, nomades de bar mal famés en bodegas sulfureuses, qu'aucune femme normalement constituée ne supporte. D'ailleurs, prévenants, jamais nous ne les y convions. Oui madame, nous savons que toutes ces histoires cent fois racontées vous interrogent : votre compagnon ne serait-il pas un peu débile d'y revenir encore ? Et bien nous, nous avons besoin de l'entendre une fois de plus. C'est comme un cours de rappel, pour être heureux, ou un stage de remise à niveau, pour rigoler entre potes, voyez ? Vouiii, on est puérils... Et on s'en fout, en plus. Alors à ce jeu, Raoul est très fort... et puis décalé, aussi et c'est ce qui me plait. Il me fait rire. Ces histoires sont un mélange poétique d'humour, de malice et de naïveté. Faut dire que l'avoir en face, en direct live, c'est une valeur ajoutée non négligeable. Car même lorsque son effet tombe à l'eau, c'est d'un comique irrésistible, vu son style et sa trombine. Alors je l'ai chopé à l'Odéon, pendant le flamenco et je ne l'ai plus lâché :
-Alles Raoul, fais moi un textounet pour mon blog, ce que tu veux, pas de règles ou de limites, zou, mets la jambe, vas-y....
Bref je l'ai tellement fatigué par le bas, que pour se débarrasser de moi, un beau jour j'ai reçu ce qui suit. J'espère que cette première séance sur le divan augure d'un long traitement afin que ça recommence souvent. Mais ça, ça dépendra un peu de vous : Raul est un artiste fragile et en tant que tel a besoin de beaucoup d'amour pour produire. Alors encouragez-le pour fêter ce que j'espère être un nouveau collaborateur occasionnel de ce blog. Notez que moi non plus je n'ai pas tout compris de cette lecture très nimo-nimoise - d'où les nombreux renvois afin que vous puissiez y comprendre quelque chose, car Raoul ignore qu'on est lu dans plus de pays qu'il n'a de doigts... - j'espère qu'au moins lui sait où il veut en venir... mais du moment qu'il s'agit de Raoul, même s'il se perd en route, je trouverai ça très drôle ! Je sais, c'est pas rationnel... Allez vas-y Raul !
Aficionado ou pas ? Le doute m’habite… (1)

- C’est grave docteur ?

- Allongez-vous et parlez-moi de votre aficion

- Eh bien voilà, docteur, ça a commencé tout petit, je rêvais d’être torero, mais, de toros- piscines en abrivados, j’ai trouvé dures les cornes des toros, même emboulées. Je me suis dit que je ne serai plus torero que par procuration depuis les pierres de l’amphithéâtre. J’ai alors applaudi à tout rompre les prestations d’Antonio, de Luis-Miguel,
de Santiago Martin, de Chicuelo 2 - bien sûr, c’était à Nîmes - et autres Aparicio, Litri, ou Ostos…

- Continuez ! Continuez…, C’est pas grave

- J’ai même vu éventrer, dans la presque indifférence générale, les derniers chevaux réformés des labours … Enfin vint le caparaçon et la mère en ski ! (2)
Mais j’ai oublié, je ne sais pas si je dois le dire ? Je dis « oublié » pour reporter la faute sur Elzeilmer (3) en réalité je crois que j’ai jamais su le nom des ganaderias qui fournissaient le bétail à l’époque. C’est grave docteur ?

- Continuez ! continuez !

- C’était le dernier de mes soucis, mais je crois que sans le savoir, j’étais atteint
De ''torerophilie'' chronique, avec complications. En bref, j’étais ''torerista''. Rassurez-vous docteur, je me suis soigné. Conseillé par de fins connaisseurs j’ai pu accéder à la lumière et entamer une cure de désintoxication : Finis les Antonio, les Curo, les Luis-Miguel, place au ganado, mes billets portent les fers d’Edouardo, de Victorino, de Jaime, de Maria-Luisa, de Dolores, d’un ecclésiastique de Valverde (4), quelquefois de Juan-Pedro ( mais faut pas le dire)

- Mais vous êtes guéri C’est un miracle !

- Hélas non, docteur ! Je crois qu’il reste, enfouies dans mon subconscient des séquelles indélébiles de ma primo-infection : ne serais-je pas porteur, certes sain, d’un virus ‘’torerista’’ genre H1 Haine 1 ?
Pour tout vous dire, docteur, et cela est l’objet principal de ma consultation,
Je me suis surpris à la dernière féria de Pentecôte, à applaudir généreusement
Javier Conde… Le plus embêtant, c’est qu’on a dû me voir. C’est grave docteur ?

- Je pense que c’est sérieux en effet, revenez me voir dans un mois. En attendant je vous prescris :

Une cuillérée à soupe, matin, midi, et soir, de l’élixir du révèrent père Dupuy (5)
Une pilule du docteur Burgoa (6) au coucher (non remboursé par la sécu.)
Une tisane par jour du père ChaCha (7)
Et si le mal persiste ,nous tenterons une injection de sérum du laboratoire
Giner (8) mais il faudra se méfier des effets indésirables par exemple le ''Syndrome de l’égoïne’’

Raul

1) Rien de sexuel
2) Claire Starozinski, ''anti'' notoire
3) J’ai aussi oublié l’orthographe
4) Rien à voir avec Camaret
5) Ex-directeur de la revue Toros
6) Chef de cabinet du maire de Nîmes
7) René Chavanieu doyen pittoresque des aficionados nimois
8) Ex président de l’ANDA, torista grand teint

4 commentaires:

Maja Lola a dit…

Effectivement "impayable" ce cher Raul. Le divan lui va bien. Mais le brave docteur Freud devrait se pencher sur son cas.
Mi-Vercingétorix mi-José Bové ?
Hum, hum ... pas très torerista tout ça !
Mais il a de la saveur le bougre !!
Maja Lola

el chulo a dit…

oui, le syndrome du clown triste en quelque sorte.

Anonyme a dit…

Libère-toi Raul !
El pipo

Anonyme a dit…

Erudit et marrant, modeste et nostalgique, Raul nous donne envie d'assister à sa thérapie. Des rencontres intéressantes sur ce blog. Avec les commentateurs aussi, le plus souvent.
Gina