mercredi 27 mai 2009

MIURA à 16,53%




16,53% c'est, à la décimale près, l'exacte proportion de Miura qu'il y avait à voir cet après-midi à Nimes. Je vous épargne le calcul, cela équivaut à un sur six. Mais pas plus qu'une hirondelle, un seul Miura ne peut faire le printemps. Quand vous achetez une Patek Philippe ou une Jaeger-Lecoultre vous lisez chaque heure sur un objet hors du commun. Quand vous achetez une Porsche ou une Aston-Martin, le luxe des équipements, la volupté du cuir Connolly, la musicalité du feulement des cylindres vous emplissent d'un bonheur ineffable : vous bénéficiez des caractéristiques recherchées. Eh bien pour agrémenter la série des vieux passéistes grincheux et leur fameux "c'était mieux avant" il faut se rappeler "qu'avant" on allait pas voir une corrida de Miura mais une Miurada. On se déplaçait volontiers de très loin. "Miurada" ça voulait tout dire, c'était vraiment des toros différents. Je n'ai jamais su quel "intelligent" de service qui présidait aux destinées de cette ganaderia avait décidé un funeste jour de je ne sais quelle manipulation génétique ou croisement secret ou volonté d'abâtardissement par sélection, mais en tout cas c'est réussi : 83,47% de déchets donc aujourd'hui à Nimes... Gâchis vraiment total car s'il n'y avait qu'une ganaderia sur terre pouvant se permettre de continuer à sortir des toros -à continuer à en vendre autant- identiques à leurs frères d'il y a deux siècles, sans céder à la pression des modes, sur son seul nom, c'était bien Miura !


Six Miuras sur six, berceau étroit et cornicortos soit l'inverse des caractéristiques de cette origine... Cinq d'entre eux faibles et naïfs... "Miura faible et naïf" quasi oxymore chez ceux d'antan (oui je sais, rien que "d'antan" ça fait ringard...) Or, je suis assez vieux (de mon temps, gngnagnngn...) pour avoir vu des courses qui laissaient lessivés sur les gradins tant la tension nerveuse était extrême. Béziers en 1983 par exemple, un très grand souvenir.
Las, malgré le "soin" apporté au choix des exemplaires dévolus à Juan Bauptista -je vous dis pas comme peuvent être providentiel les sorteos, parfois- Curro Carro, l'expert des corrales auquel Midi-Libre ouvrait ses colonnes humoristiques, ne pourra pas encore visser sa plaque de Devin-Grand-Médium car il s'est planté, lui qui prédisait un triomphe de Juan Bauptista devant les bestiaux de Zahariche à l'instar de celui d'Ojeda. La deuxième prédiction était pour dimanche je crois, avec un indulto annoncé pour... ? Enfin bref, c'est dans le canard de Dimanche dernier, consultez vos tablettes ! Et moi qui trouvais à la corrida le mérite d'être le seul spectacle non écrit d'avance... ça m'a foutu un choc : on pouvait donc tout prévoir et l'organisation y travaillait : ben merde alors ! Pourtant, question prestation aléatoire, Curro Caro se posait un peu là ; y'avait pas plus fortiche ! De son temps où il passait du pire au meilleur en passant par l'espantada il n'était pas si pétri de certitudes !!!
Enfin il est sorti Zabaleto, en cinquième position, negro mulato ou réglisse-dos-menthe-ventre si vous préférez, à exactement 20 heures 04 -voir photo en en-tête- et là, la faille de San Andreas s'est rouverte sous nos pieds, Zabaleto 602 kg de sentido était un "méchantas" comme cela faisait longtemps qu'on en avait pas observé. Il ne lui manquait qu'une armure plus ouverte pour être un terrorifique bestiau. Heureusement, il échut au plus aguerri des combattants de fond de ruedos, Rafaellillo-le-vaillant. Le vaillant pur et dur n'est pas un artiste, c'est un vaillant au mental, que la difficulté ne décompose pas mais galvanise. Le vaillant est issu d'une anomalie psychique. Là où l'unanimité conclurait qu'il faut se sauvegarder d'urgence, le vaillant, cette exception, s'offre et augmente la prise de risque. Dans le civil on appelle ça un fou. En habit de lumière c'est "Torero" qu'on dit, allez comprendre. D'autant que, constatez vous même en visitant les sites taurins, dans la plupart des cas sur les photos, le garrot du toro culmine à la ceinture du torero. Oui, beaucoup de toreros sont de grands spécialistes du raticide. Mais là, non... allez d'accord, je vous mets une autre petite photo pour que vous puissiez juger... (on clique) Si, il est bien là, juste derrière et debout, on voit ses cheveux derrière la banderille... Il y a trois jours c'était pas mieux devant les Dolores Aguirre d'Alès. Alors chapeau, petit homme ! Rafaellillo n'est pas grand, mais il est vaillant, le Kirikou des ruedos... Discret en plus, pas gueulard pour deux sous comme Padilla le flibustier à rouflaquettes suspecté de radicalisation avec l'âge : j'ai l'impression qu'il veut devenir le sosie de Pepe Hillo ! Le journal décidément plein d'humour nous l'avait annoncé trois jours plus tôt épaule luxée et là il plantait allègrement les banderilles al violin et exhortait les foules à grands renforts de secousses brachiales : c'est des farceurs à Midi-Libre, hein ? Parce que mes patients, après une luxation, ils ont le bras collé au corps dans une écharpe et mettent plusieurs semaines rien que pour se gratter l'oreille, voyez...? Ou alors il est chargé à la cocaïne ? Ce qui expliquerait certaines excentricités !
juan Bauptista est un torero qui m'a toujours laissé froid. Les Miuras ne lui ont pas permis de me réchauffer. J'oubliais : une tarde de grand Mistral !!! Ce qui n'a rien facilité !

Aucun commentaire: