mercredi 25 mars 2015

Tuons comme Léon

Un Homme Idéal de Yann Goslan




Aaaah l’écriture…. Le point de départ est la frustration intolérable d’une ambition déçue, de la souffrance d’un manque de reconnaissance. Imaginez : vous vous piquez d’écrire et unfortunately, les maisons d’édition restent hermétiques à votre ‘’génie’’… Ha, Ha Ha… ça rappelle des choses à quelqu’un ? Je veux les noms… vous serez publiés ! En tant que ratés s’entend. Allez zou, un petit coup de canif dans les entrailles, histoire de se rééduquer l’ego, non ? Vraiment pas ? Ils sont où les ratés du prix Hemingway par exemple, hein ? Les pas vainqueurs, les même pas finalistes, les bouffis-indignés qui écrivent à la direction pour s’indigner de pas avoir été choisis, hein ? Même pas honte ??? Non mais dis donc, espèce de gros raté pétri de ‘’GRANDECRIVISME’’ sors de ta bouffissure ! Tu veux que je te montre l’exemple ? Raté 1er : Delon ! Allez envoie ton nom GRANCOUILLONDEPROSATEUR… (et allez… encore un wagon d’ennemis sournois)

Oh pardon... reprenons : Et donc comme tous les ratés, ou, soyons plus délicats, comme tous les pas encore révélés, Niney, alias Mathieu Vasseur, survit d’expédients, de petits boulots comme débarrasseur de caves et de greniers et un jour lui tombe dans les mains du haut d’une armoire, un manuscrit : le journal d’un appelé en Algérie. C’est percutant dès la première phrase :
<< Ce matin, j’ai tué un homme >>
et Mathieu, piètre écrivain mais bon lecteur, identifie que ce journal peut faire mouche. C’est pour lui une révélation, ça peut être comme ça la littérature, pas besoin de mots savants dont quatre-vingts pour cent de la population ignorent le sens. Ca peut être simple, direct, à l’os, impressionnant de vérité, la preuve, il est le premier fasciné. Alors, cette maison à vider ayant été déclarée appartenir à un homme seul dont la dépouille n’a pas été réclamée, il s’approprie l’œuvre, la recopie, la signe, l’envoie et … bingo, prix Renaudot ! Fortune, Amour, Gloire, Ray-ban, BMW, etc.

Mais quand on initie une procédure à l’envers, on ne se rend pas toujours compte des conséquences à venir. Rétropédalage assuré. Il faut par exemple réaliser en urgence, au moment même où l’éditeur vous annonce qu’il veut vous publier, qu’il va falloir tout savoir de cette guerre d’Algérie pour justifier ne serait-ce que le travail de documentation supposé. Il faut apprendre les postures et tirades de l’Ecrivain, soutenir les interviews, bref, apparaître crédible par rapport à la qualité de son œuvre. Ne pas décevoir, mais, si donner le change est possible dans le temps béni de la séduction, dans la durée, les inévitables complications rappliquent plus vite qu’une charge de fellaghas déchaînés. Alors, quand l’étau se resserre, pour ne rien perdre, dans cette urgence absolue, si tuer permet de fuir dignement la réalité, tuons. Comme Léon Vauban le fit en Algérie entre deux paragraphes de son journal.
Le type d'engrenage traité aussi, on s'en souvient, par Woody Allen dans Match Point

Mais ici, la fin éminemment plus cruelle et spectaculaire, n’a pu sortir que du cerveau malade d’un de ces écrivains au cerveau persillé de ce truc appelé talent, car... non, je ne vous explique pas. Il vous faudra donc vous déplacer pour la connaître. D'autant que, pour tout vous dire lecteurs, je n'ai pas que ça à f... on soupire dans la salle d'attente... Allez-y, je vous y encourage car << ça vaut le voyage >> comme ils disent chez Michelin.

2 commentaires:

el Chulo a dit…

Moi ça me rappelle la très célèbre première phrase de l'Etranger de Camus "Aujourd'hui, maman est morte".

Marc Delon a dit…

y'a que des génies... que des gens qui ne savent pas rire d'eux-mêmes... je n'ai reçu aucun nom ;-)