jeudi 19 février 2009

CARNET DE RUEDOS



L'oeil de Miguel



Miguel Rodriguez a quasiment disparu de la circulation. Il n’imbibe plus le sable des ruedos, du sang des toros. Il était torero pourtant, mais comment dire… si vous êtes un mauvais commerçant vous pouvez continuer à mal vendre jusqu’à la retraite. Un torero médiocre qui n’aurait pas le feu sacré au point de démontrer tous les dimanches qu’il accepte le choix total de triompher ou mourir, à quoi peut-il servir, sinon à ennuyer les publics ?
A rien, a-t-il dû se répondre avant de ‘’disparaître’’. D'autant plus que dans ce cas, la disette de contrat aide au choix. S’il le faut, l’on se trompe, et il sillonne toujours les routes du toro, de pueblo en pueblo, son manque de notoriété l’ayant fait choir de l’autoroute qui mène aux grandes places glorieuses, vers l’anonymat des départementales qui mènent aux placitas pittoresques. Ce qui serait plus pathétique encore. Nous avions croisé sa route dans cette ferme du Gers où il faisait étape accompagné de sa cuadrilla avec laquelle je partageais une salle de bains des plus spartiates. Cela ne donnait pas grand genre au gîte rural que tous ces types s’apostrophant de chambre en chambre, portes grandes ouvertes, à poil sur leur lit et cigarette au bec comme s'ils étaient seuls. Si l’allemand est une langue réputée gutturale, l’espagnol est volontiers rocailleux et tonitruant… Enfin, le lendemain, au déjeuner d’avant la course, nous avions pris notre revanche, mangeant le ''grand repas'' sous leurs yeux, alors qu’ils étaient contraints à avaler la soupe claire, éventuelle anesthésie générale oblige : pour nous, Garbure en entrée , à elle seule un repas complet, foies gras en tranches paysannes de quatre centimètres d’épaisseur, pintades fermières, devant nous attrapées la veille, et dures comme des pierres, servies avec un accompagnement varié du potager, plateau de fromages et enfin croustade, le tout copieusement arrosé de crus locaux : Floc en apéritif, Tariquet gouleyant et Madiran boisé pour faire glisser les volailles granitiques. On avait même subi le coup de grâce avec la boisson concoctée par le patron : le pousse-râpière, une sorte de cocktail atomique et gazeux, Armagnac et Champagne je crois, enfin un truc traître, apte à vous faire basculer dans un autre monde en moins de temps qu’il n’en faut à un toro pour vous encorner, à cause de cette action oxygénante des bulles qui favorisait le passage rapide de l'Armagnac dans le sang ! C’est dire si on avait des chances d'ignorer l'impudeur de notre conduite auprès de gens qui allaient risquer leur vie dans l’après-midi. Mais après tout, à chacun son rôle, eux, acteurs, nous spectateurs. Miguel Rodriguez nous avait signé une photo que personne ne lui avait demandée, peut-être histoire de se conforter dans son statut. Remerciements polis et barrière de la langue… aficionados de Nimès... suerte y olé, maestro !
IL était pâle, il savait qu’il devrait prendre dans le ruedo vicois, ce grand toro à la tête noire et au corps blanc. Ce contraste d’ascèse et de ripaille expliquait qu’il lance à nous autres, admirateurs de son art, des regards mauvais, tenaillé qu’il était par la peur et la faim. D’ailleurs, regardez-le cet œil noir qui ne quitte pas la tête du grand toro. Comment réussir à devenir un grand torero quand vous restez suspicieux, incapable de vous oublier, de vous confier, relâché et indifférent à ce qui peut faire basculer une vie en destin ?

8 commentaires:

Marc Delon a dit…

Voila, voila, Emma, y'a qu'à demander...

Marc Delon a dit…

Pour voir l'oeil de Miguel, on clique sur l'oeil de Miguel...

Anonyme a dit…

je peux ?

Anonyme a dit…

Le pousse-rapière se fait généralement avec un mousseux blanc de blanc.
Garde le champ' pour la féria de Nîmes!

isa (40)

emma a dit…

haaaaa merci mon petit marc!tu es genial!!!!
moi je n'ai que des chevaux de polo ici!!!alors je suis vraiment en manque de TORO BRAVO!!!!!!!
encore merci!

Anonyme a dit…

J'aimerais connaître la suite : les ripailleurs ont-ils suivi le spectacle ou se sont-ils endormis ?
Gina

Anonyme a dit…

Sans déconner, Emma t'as pas de bol ,tu peux que faire du polo pendant que les classes moyennes prennent la crise en pleine gueule et battent le pavé!!!!

emma a dit…

hé hé hé desolé bruno!!!j'espere que tu n'as pas trop mal.....lol
bon pour te reconforter viens faire un petit tours au polo club!ca te remontera le moral!c'est vraiment genial ici!!!ouvert au public a partir de mars,quand les matchs commence!!!le weekend biensur!