mardi 21 octobre 2014

Un peu de douceur ?


Sesterces, Roupies, Pesetas

Le tribunal de Dax a rendu son délibéré, ce lundi matin (13 octobre), au sujet des manifestations organisées sans autorisation les 24 août et 24 novembre 2013 à Rion-des-Landes
Les militants antitaurins n'avaient pas fait le déplacement à Dax ce lundi matin pour prendre connaissance en direct du délibéré du tribunal correctionnel de Dax à leur encontre.Le président du Comité radicalement anticorrida Europe, Jean-Pierre Garrigues, celui de l'association belge Animaux en péril, Jean-Marc Montegnies,Christophe Marie et Xavier Renou sont condamnés à 3.000 euros d'amende pour avoir organisé une manifestation interdite sur la voie publique le 24 août 2013 à Rion-des-Landes et pour entrave à la liberté du travail, celle des novilleros en l'occurrence, au cours de cette journée taurine particulièrement perturbée. 
Les quatre prévenus devront verser solidairement 2.500 euros de dommages et intérêts à la commune de Rion, et 2.500 euros au Cercle taurin rionnais, plus 1.500 euros à chacune des deux parties civiles pour les frais de défense. Les militants antitaurins sont en revanche relaxés pour la mise en danger d'autrui, tout comme, Alain Senac, qui aurait tenté ce jour-là de libérer les novillos de la bétaillère où ils étaient parqués.
Egalement poursuivie pour organisation d'une manifestation sans déclaration sur la voie publique le 24 novembre, toujours à Rion-des-Landes, l'internaute Sabine Landais est aussi condamnée à 3.000 euros d'amende. Alexandre Audy à 1.500 euros pour entrave à la circulation des véhicules. Les deux prévenus devront solidairement verser 1.500 euros de dommages et intérêts à la commune de Rion et au Cercle taurin, plus 1.000 euros pour les frais de défense.
Même si les peines prononcées sont moins élevées que celles requises par le Parquet (4.500 euros d'amende) et les dommages et intérêts bien loin des sommes demandées (10.000 euros), Me Guillaume François, avocat de la commune de Rion et du Cercle taurin rionnais, se déclarait satisfait du jugement dacquois au sortir de la salle d'audience ce lundi matin: "Ce ne sont pas des amendes symboliques mais des condamnations lourdes qui reconnaissent le préjudice subi à sa pleine mesure. Il ne s'agissait pas pour nous d'assécher des associations, qui ont par ailleurs beaucoup de moyens, mais de montrer que dans un Etat de droit, on ne peut pas faire n'importe quoi. On doit pouvoir organiser des spectacles taurins sans avoir à barricader des villages, ce qui n'est ni l'esprit de la loi, ni celui des fêtes".
 
Article paru dans Sud-Ouest et piqué sur http://lotaureroge.canalblog.com/

dimanche 19 octobre 2014

Un Tabernacle de Film !


J’avoue avoir craint le phénomène de mode, le dernier réalisateur branchouille qu’il était de bon ton d’aller voir pour être à la pointe fashionistique culturelle de la rentrée. Mea culpa. Mea maxima culpa.

Xavier Dolan signe avec Mommy un film de Cinéma, pas une historiette. Créatif, il utilise la technique pour servir son propos : le format resserré 4/3 que je prévoyais désagréable mais quoi de plus cohérent que ce format ''portrait'' pour camper ses personnages,  scruter leur sensibilité jusqu’à l’os, sans la tentation de la dissipation du regard dans le champ d’un grand-angle ? Un grand-angle qui adviendra, plein de sens, quand le personnage épris de liberté respirera mieux. Trouvaille toute simple mais si éloquente. La musique, bien sûr, qui convoque et confronte en chacun de nous l’écho qu’elle rencontra dans notre propre vie à ce qu’elle illustre ici, le flou, enfin, comme l’écriture tremblée, fébrile, d’une fiction rêvée que la vie est si douée à déjouer.

Dolan explore le rapport mère-fils, d’une mère non DHEA avec un fils TDAH, qui heurte sa sensibilité à la rencontre du monde après la perte de son père. Le chum joué par Antoine-Olivier Pilon se cogne en rythme à la difficulté de trouver sa place quand fuient les repères. Sa mère, l’extraordinaire Hélène Dorlac en veuve sexy et apparemment déjantée mais profonde, la voisine énigmatique et dévouée, non moins remarquable Suzanne Clément, bègue ou loquace selon son degré d’inhibition et son sentiment d’utilité, vont associer leurs efforts et leur amour de la vie pour tenter de canaliser la forge violente, émouvante et pure qui pulse dans le cœur de l’adolescent presque incontrôlable. Sans théâtralité mais crûment, dans l’authenticité de sentiments réels parfois prompts à emprunter de mauvais raccourcis et toujours pour cet adolescent en quête d’absolu, dans la recherche éperdue de l’amour de sa mère qu’il voudrait total, irremplaçable, universel, capable de combler l’autre à lui seul, chacun se raccrochant à son indéfectible espoir pour survivre heureux, à tous les drames de la vie.

« Tu as peur que je t’aime moins mon fils ? Mais ça n’est pas possible ce que tu dis, ça ne peut pas arriver, une mère ne peut pas aimer moins son enfant, jamais, c’est toi, plutôt, qui m’aimera de moins en moins, c’est inscrit dans notre nature… »

On sort de la salle - la toute nouvelle "6" du Sémaphore à Nîmes, toute pimpante avec son grand écran - comme au travers d’une vitre traversée à toute allure vers la liberté, dans la fragmentation d’émotions multiples, autant d’éclats de verre aiguisant notre sensibilité enfin réveillée avec cette question en tête :

Comment se fait-il qu’un jeune homme de vingt-cinq ans ait assez de recul et de maturité pour traiter avec tant de talent un tel sujet ? Sans doute avec cette notion qui nous échappe, de l’ordre du génie, avec lequel El Juli se jouait de noirs ambassadeurs de la mort à quatorze ans déjà, celui avec lequel Françoise Sagan écrivit « Bonjour Tristesse » à l’âge de dix-huit ans.

dimanche 5 octobre 2014

Confidences sur la Conférence

C'que ça m'a fait à moi ? C'est simple, il y a trois tiers, comme dans la corrida.

 Avant, tu stresses, mobilisé, pendant, t'es grisé, stimulé, après t'es soulagé, liquéfié... Ah oui, et puis la honte aussi, juste avant le troisième tiers, quand tu te rends compte que c'est toi qu'on applaudit... tu ne te sens pas vraiment mériter l'hommage, limite si tu les suspectes pas de se foutre de toi !

C'est là que tu te dis que l'autre pueblerino, là, devant sa chèvre, qui secouait les bras pour susciter l'ovation du public alors qu'il l'avait bien escroqué avec son toreo de perfil et abus du pico, c'était vraiment un enfoiré... 

Le démarrage est difficile, si tu piques du nez dans ta feuille pour t'y réfugier, ton deuxième lobe cérébral - ton quant à soi - celui qui n'est pas occupé à produire la conférence, te dit que tu ne dois pas éveiller grand intérêt à loucher comme ça sur ta feuille en ignorant l'auditoire... alors tu jettes ton regard dans le public par un travelling panoramique poli afin de les considérer, et là, gloups, la trouille !!! Ils sont bien là, tranquilles, à t'écouter posément, à l'abri du recul de leur pensée, scrutant le moindre de tes tics... tu as vraiment l'impression d'être coincé dans une solution aqueuse entre deux lamelles de verres sous le microscope de leur psychisme. Microbe. 

Et là tu te dis que pueblerino ou pas, faut y aller quand même, là devant ! 

Par chance, tu croises dans le nombre, un regard amical, bienveillant, et cette inconnue dont les yeux sourient gentiment comme pour te donner la force, tu t'y raccroches à chaque fois que tu lèves la tête.
Merci madame. Ouais, j'suis un sensibilus, moi, même si je n'en ai pas l'air.

C'que ça leur a fait à eux ?

J'aimerais bien qu'ils viennent au rapport me le dire tiens, dans les commentaires... Sinon j'offrirai à Crépin une séance gratuite de Kinésithérapie et une fois raccordé aux électrodes, il parlera le garçon !

Après, tu bois - bon - tu manges - bien - tu rentres à tu casa épuisé et heureux, tu ouvres ton livre du moment afin que le sommeil te cueille au fil des pages, "Les Perroquets de la Place d'Arezzo"  d'Eric Emmanuel Schmitt et soudain, je te le jure lecteur, tu tombes là dessus :

Il eut envie de s'enfuir : il n'avait rien préparé.
  • Vous n'auriez pas un bureau où je pourrais m'isoler ?
  • Quoi ? Vous ne buvez pas avec nous ?
Baptiste lorgna le bourgmestre joyeux, couperosé, qui lui tendait gentiment un verre. Il faillit lui dire que s'il montait sur scène dans son état, il n'y aurait plus un spectateur la fois prochaine.
  • Plus tard..., murmura-t-il avec un sourire complice qui semblait indiquer qu'à l'issue du débat, les folies seraient possibles.
Après qu'il eut payé son tribut à la bonne humeur, on l'emmena se préparer dans une pièce.
« A quoi sert la littérature ? » annonçait le prospectus de la conférence.
Baptiste plia une feuille en deux, la griffonna. Tel un pianiste qui note les accords sur lesquels il va improviser, il établit les points qu'il allait aborder. Un auteur qui s'adresse à une foule tient plus du jazzman que du compositeur classique ; au lieu d'écrire un texte et de l'exécuter, il doit créer un moment unique devant des spectateurs en prenant des risques, en se lançant dans des digressions, en retombant sur ses pattes, en accueillant la formule qui surgit, en laissant l'émotion colorer une idée avant de rebondir par une rupture de ton, de rythme. Si Baptiste ne rédigeait pas ses conférences, ce n'était point par irrespect, plutôt par respect du public.
Chaque fois que, par le passé, il avait consigné une intervention, cette dernière avait perdu toute vie lorsqu'il l'avait ânonnée sur l'estrade, le nez entre ses pages, terne, vide de présence ; lecteur, il ne touchait pas le cœur des gens, lesquels avaient l'impression que le vrai Baptiste resté à la maison avait envoyé son frère jumeau, moins verveux, moins pétillant, bafouiller des mots à sa place. Baptiste avait conclu qu'il était un médiocre acteur de lui-même.
En revanche, lorsque, pris de court ou privé de ses feuilles égarées, il avait dû improviser, il avait soulevé la salle. Parler comme il écrit, pour un écrivain, n'est pas lire un texte composé, mais retrouver face au public l'audace inventive de la solitude, donner le spectacle d'un esprit en action. Il devait montrer le feu, pas l'objet froid ; le travail, pas le résultat.
Ce samedi soir, Baptiste conclut qu'il devait avoir confiance en lui pour s'exhiber dans sa forge. Là résidait la difficulté : ces derniers temps, s'il avait gagné de l'assurance quant à sa capacité de séduire, de jouir et de faire jouir, il avait négligé son second métier - l'écrivain qui parle au service de l'écrivain qui écrit.
On vint le chercher. Il entra devant un auditoire qui l'applaudit à tout rompre.
Aussitôt les visages tendus vers lui l'encouragèrent... Il s'envola sur les ailes de l'inspiration, oscillant entre la naïveté et la haute culture, sa naïveté n'était pas fausse, pas plus que sa culture, pourtant les deux étaient jouées.
Une heure plus tard, l'assemblée lui fit un triomphe et on l'emmena jusqu'au hall pour qu'il dédicace ses livres.
Autour de sa table, plusieurs personnes du métier lui tenaient compagnie, des représentants de la maison d'édition, un libraire, Faustina, l'attachée de presse qu'il appréciait comme un personnage de fiction mais qui l'attirait peu – il attendait le moment où, allant trop loin, elle abandonnerait la drôlerie pour la méchanceté, l'esprit pour le cancan.
Or, pendant qu'il apposait son paraphe sur les volumes, faustina et ses collègues lui manifestèrent une gentillesse empressée, sinon exagérée, où il perçut une pointe de pitié.
« Qu'ai-je de pathétique ? Ma conférence a-t-elle été ridicule ? »

vendredi 3 octobre 2014

La Pensée du jour



Plus j'écris, plus il m'est pénible d'écrire. Moins j'écris, plus il m'est pénible de vivre.

Nada