dimanche 30 novembre 2008

CARNET DE RUEDOS





Les Couilles du Cyclone
C’est la vérité, ce type est un cas. Essayez de lui résister pour voir. Boudez votre plaisir juste un peu. Padilla vous emporte, vous entraîne dans son sillage, à votre être défendant au besoin, freinant des deux pieds tout hérissé de vos différences et irrité des scories de son style comme autant d’allergènes dont il vous bombarde, mais il vous traîne quand même avec lui pour une part. Car vous finirez toujours, non pas obligatoirement par goûter son toreo de bazar où se trouve à peu près tout et n’importe quoi, plastique makache, esthétique oualou et éclat de pacotille, mais par saluer l’entièreté de sa personnalité que même votre réserve voire votre aversion est incapable de fragmenter. Ce torero est un filon d’enthousiasme, une mine de conviction et une débauche d’énergie à lui tout seul. D'où son surnom « le cyclone de Jerez » Aucune pépite de grande classe, aucun atome d’art, nada. Dans le cyclone, ne tourbillonne qu’un pêle-mêle gras et joyeux de tout le trivial qu’il faudrait interdire aux enfants souhaitant apprendre à toréer. Padilla est au toreo ce que patrick Sébastien est à la chanson française et benoit Poelvoorde au cinéma : un fêtard de pueblo, une ritournelle de troisième mi-temps rugbistique, un boosté halluciné. Regarde Padilla petit, et vois ce qu’il ne faut pas faire… Pourtant Juan José déborde d’une si inébranlable conviction, est lui-même si débordé de son propre allant, que lui demander de ne plus en faire des tonnes équivaudrait à demander a un poisson de nager hors de l’eau. C’est impossible. On ne compte plus les après-midi qu’il a sauvé de l’ennui, les arènes ébrouées de leur torpeur ou les publics électrisés par ses braillements gutturaux orchestrés à grand renfort de bras interminables vigoureusement branlés pour recruter les foules. Qu’il coupe des oreilles -et comment n’en couperait-il pas, public en poche hurlant à chaque seconde d’hésitation du palco- et il ne s’en débarrasse pas prestement à la manière d’un Curro Romero dégouté par les appendices sanguinolents, non, il les pressera, les secouera, les traira chaleureusement sous votre nez jusqu’à en faire dégouliner le sang dans ses manches, agitera frénétiquement ces lambeaux de chair velue et cartilagineuse et qui sait si, dans un accès de bonheur incontrôlable, il ne maculera pas votre belle robe madame, en vous le balançant, hilare, sur la poitrine. En bref, madame, si vous vivez dans la bonne société, celle disons, attachée aux conventions bourgeoises là où les règles sociétales s’apprécient entres personnes discrètes et de bon aloi aux positions modérées en tout, il ne représente pas le gendre idéal. Celui que vous auriez tenu à séduire vous aussi à votre façon et que vous auriez été fière de présenter à vos amies. Seule votre fille aurait peut-être eu un jouissif parti à tirer de cette euphorie ambiante mais ne nous aventurons pas plus loin sur ce terrain qui a déjà glissé quand un journaliste saluant un jour l’entrain et le courage du torero intitula son article d’un audacieux :
¡ VIVE TES COUILLES, PADILLA !
Effectivement, si on peut ratiociner sur le reste, on est bien obligé d'admettre que de ce côté-là, le garçon est pourvu.

La Pensée du Jour

Il est deux mots en ce monde : l'un est "mien" et l'autre "tien". Se peut-il qu'on les confonde, la paix serait notre bien.
Jacob Van Maerlant
v.1230-1300

LA ROBE BLANCHE




En action dans sa robe blanche, la danseuse de la compagnie Luisa
























samedi 29 novembre 2008

La Pensée du Jour


Si je ne peux pas fumer de cigares au ciel, je n'irais pas.
Mark Twain

Aide-toi, le ciel t'aidera

Film de François Dupeyron
La chambre est petite, l'ameublement spartiate et le lit étroit. Félicité Wouassi accepte pourtant de se dévêtir et de s'y allonger nue, éclaboussant de sa beauté africaine la nuit de pleine lune de cet été caniculaire qui décime les vieux. Elle le fait à la demande de son voisin décati, un claude Rich en vieillard asthmatique, qui sent la vie s'en aller et veut une dernière fois vivre intensément entre deux bouffées de ventoline. A "Sonia" -ainsi qu'à toutes les femmes- il réaffirme "qu'il n'y a que ça qui vaille la peine" quand il pose la main sur la jolie peau veloutée. Dans la vie de tous les jours, on est dans une cité et chacun s'arrange pour survivre avec sa morale, l'état et ses subventions et le conflit entre ses désirs et l'éthique. Même si Sonia cède à sa requête sous la pression de raisons inavouables virant au chantage, il la touchera avec respect, l'enveloppera de paroles bienveillantes avant qu'ils ne s'endorment tous deux confiants, pour une nuit et pour l'éternité. François Dupeyron réussit le pari de nous parler des cités avec humour et poésie sans en occulter les drames mais en gardant entrouverte la porte de l'optimisme dont ne se départira jamais son personnage principal pourtant confronté le même jour à la grossesse de sa cadette, au mariage de son aînée et à la mort de son mari. "Sonia-Félicité" ne baissera jamais les bras et trouvera même à son coeur une raison d'espérer car il n'y a effectivement que ça qui vaille la peine : l'écoute d'un autre coeur.

PHOTOSHOP POUR LES NULS


Le nul c'est moi. La retouche photographique est un aspect qui ne m'a jamais attiré. J'ai eu des copains au temps de l'argentique, plus épanouis et doués au labo que créatifs à la prise de vue. Mais pour être un bon laborantin il fallait être tout ce que je n'étais pas : méticuleux, organisé, méthodique, il fallait déclarer une guerre sans merci à la poussière, il fallait classer, étiqueter, aimer la chimie, mesurer précisément le temps qui passe et respecter scrupuleusement la stabilité des degrés celsius, vivre une vie de chauve-souris, j'en passe et des plus contraignants. Autant dire qu'avec ce vécu, je ne m'étais par principe jamais intéressé à la retouche numérique. Mais les fichiers gagnent tous à être améliorés : la différence est grande entre le fichier natif et retouché. Je m'y suis donc mis pour les retouches de base. Mais l'autre soir, j'ai poussé un peu plus loin l'investigation et me suis amusé à rechercher les effets spéciaux. Comme à chaque fois que je m'amuse tout n'est pas de trés bon goût... Enfin, vous me direz... j'ai mis à profit la séance de Sylvie pour expérimenter divers rendus.




vendredi 28 novembre 2008

La Pensée du Jour :

Là est toute la problématique de l'éternel masculin : la femme que l'on aime n'est pas celle que l'on désire.
Eric Zeymour
dans "On n'est pas couché" sur le coup des trois heures du matin...

jeudi 27 novembre 2008

La Possibilité d'une Île

Michel Houellebecq

Le narrateur se situe dans un monde futur et de là, observe la terre, quand tout ce qui est en germe aujourd’hui a accompli ses méfaits et qu’il ne reste que quelques « Sauvages ». Il reviendra parmi les débris et il ne regrette que Fox, son chien. Il parle en biologiste, en sociologue, en savant, en philosophe nietzschéen le plus souvent, qui juge, démolit, avec humour ou sarcasme, notre vie quotidienne, insistant sur sa misère, celle de tous, des vieux surtout, des hommes jamais sexuellement satisfaits, inquiets devant le vieillissement -d’autant plus que le jeunisme gagne- devant l’impuissance, la fuite du désir. L’histoire intéresse par la réflexion qu’elle soulève à chaque page. Un excellent moyen de penser et de s’éloigner des clichés.

Gina.

LE "CHOUTiiiNGUE" de SYLVIE

Sylvie m'a dit oui. Oui pour la séance photo, oui pour la publication sur le blog. Alors moi je dis :
Merci Sylvie... Soyez indulgents nous n'avions ni projecteurs, ni parapluies diffuseurs, ni réflecteurs, ni l'habitude de faire ça... juste un modèle amateur (même pas aficionada) face à un amateur photographe. Si on veut, on clique sur Sylvie pour l' AGRANDIRRRR...




















La Pensée du Jour

Nul n'écrit de journal exclusivement pour lui-même. On cherche, plus ou moins consciemment, le contact avec un éventuel lecteur, ou encore avec cet "autre" que l'on sera plus tard.
Pavlos ZANNAS

mercredi 26 novembre 2008

POURQUOI ALLEZ-VOUS VOIR LES CORRIDAS ?

¡ POBRE DE MI !
de Simone SALOMON


Je vais remonter à la fin des temps, il y a des siècles et des siècles. Je suis en effet de la génération qui a vu toréer Dominguin, Ordonez, Bienvenida, Litri et bien d’autres ! Et pourtant rien ne m’y prédisposait ou presque. Née à Paris, je ne connaissais, quand j’étais petite, que les arènes de Lutèce, où je ne vis que des ruines. Mais voilà, mon père alors qu’il était jeune étudiant en « lettres classiques », des années auparavant, avait eu, un été, une bourse d’études pour enseigner la littérature romantique française aux étudiants portugais de l’université de Porto, et il se prit d’attachement pour la péninsule. De loin ; parce qu’il resta fidèle au grec et au latin ; et très abstraitement ou intellectuellement, puisque c’est la fréquentation d’écrivains français, tel que Prosper Mérimée ( vous savez CARMEN ), dont il éditera plus tard, dans la collection de « La Pléiade » les oeuvres complètes, et George Sand ( Un Hiver à Majorque ) dont il restera un spécialiste toute sa vie durant, qui entretiendront cette petite flamme. Il ne revint en Espagne que sur la fin de sa vie, quelque cinquante ans plus tard, quand nous l’avons emmené avec nous y passer un mois de vacances.
Alors ? Alors, après la guerre, nous avons quitté Paris, et c’est dans une petite ville de l’Ouest que j’entrai en classe de 4ème, au lycée, et que se posa le problème : comme j’avais fait du latin depuis la sixième, allais-je faire du grec, comme papa ou une deuxième langue vivante, par exemple de l’allemand, toujours comme papa ? Ni l’un ni l’autre ne me tentaient ; et mon père me laissa choisir l’étude de l’espagnol, après trois mois de grec, quand même « pour voir ». J’ai tout de suite aimé l’espagnol, ses musiques, sa littérature, ses danses, ses costumes, ses coutumes, son soleil, ses saveurs, ses horizons, son histoire, et son mystère ; parce qu’a cette époque-là, la frontière était toujours fermée . C’était à la fin des années quarante. J’étais bonne élève. En classe de seconde, j’ai eu le prix d’excellence et presque tous les premiers prix. Mes parents voulurent me récompenser.
Depuis quelques temps, j’avais une correspondante à Pamplona, plus âgée que moi, d’une famille très francophile, mais antifranquiste. Comme la frontière venait de s’ouvrir, elle m’invitait à partager un mois avec ses parents, ses quatre sœurs et son frère, comme une enfant venue du pays des libertés. Après quelques semaines d’hésitations et devant mon insistance, mes parents décidèrent de me faire confiance : avec un passeport tout neuf en mains, mon billet de train et ma valise, me voici sur le quai de la gare, en route vers le sud. J’avais quinze ans.
Première étape la gare de Bordeaux, une nuit à attendre la correspondance, un peu angoissée. Au petit matin, je grimpe dans le train pour Hendaye, longue traversée des Landes, puis arrivée à la frontière, cérémonie des papiers d’identité, passeport, fouille de la valise, changement de train, et c’est le plongeon dans l’inconnu.
Au lycée, je n’avais jamais parlé qu’une langue scolaire, enseignée par une malheureuse qui n’avait jamais mis les pieds en Espagne, et je me retrouve de l’autre coté de la frontière, à la nuit tombante, dans un petit train, avec une plate forme centrale comme dans ceux des westerns, escaladant les montagnes du Pays basque et de Navarre, au milieu d’un de ces terribles orages de montagne qui obligeait le train à s'arrêter à chaque éclair, tandis que les femmes réunies au milieu du wagon, à genoux, priaient. En basque ! Dans cette langue dont je ne connaissais pas un traître mot, elles semblaient m’inviter à me joindre à elles : j’étais morte de peur.
Mais je l’avais voulu ce voyage et je fis « de tripas corrazon », comme on m’avait appris, contre mauvaise fortune bon cœur en quelque sorte. Heureusement les éclairs se calmèrent, le train reprit une allure plus régulière, mais c’est brisée de fatigue et d’émotions, sale, fière de moi pourtant, que j’arrivai en gare de Pamplona.
Presque tout de suite, dans la foule, mes amis me reconnurent, d'après les photos que je leur avais envoyées, m’entourèrent et me conduisirent aussitôt à la maison. Il y avait quarante huit heures que je voyageais, et j’étais rompue de fatigue ; je pensais, après les présentations prendre un bon bain et profiter d’un sommeil bien mérité. Pourtant une nouvelle épreuve m’attendait.
Les filles, Carmen, Marite, Luisa et Josefina m’installèrent en face d’un miroir, tandis qu’elles retouchaient leur maquillage ; « prépare-toi, dépêche toi on sort ! » il était prés de minuit, on était le sept juillet . Je me suis donc retrouvée dans la rue, noire de monde - si je puis dire ! - parce que tous les garçons étaient de blanc vêtus, avec le béret rouge, le foulard rouge, la ceinture et les espadrilles de même couleur, chantant, dansant au son du xistu, buvant à leur gourde en peau de chèvre, le vin de Navarre. Les femmes, un oeillet dans les cheveux étaient aussi élégantes que sur les catalogues de mode, jupe étroite et talons hauts, et les bébés dans les landaus dormaient enfouis dans les dentelles, malgré le vacarme assourdissant des bandas. Et moi plus grande que la majorité des filles, avec mes longs cheveux raides, ma robe vichy à carreaux et mes espadrilles, je fus vite engloutie dans ce tourbillon, présentée à Untel, à Machin, à Chose, au novio, à la novia, au cousin, à la belle sœur, à la nena, au primo : « la francesita, la francesita »
J’avais chaud, on me donna à boire, on me fit passer par ici, puis par-là, prendre mon premier bocadillo, encore un peu à boire et, c’est ivre de fatigue qu’avec les quatre sœurs, je rentrai enfin me coucher, toutes les quatre avec nos chaussures à la main, pour ne pas risquer de réveiller Miguelcho, le fils de la maison, qui courrait l’encierro le matin même. Je dormis très peu cette première nuit. Et je ne vis pas Miguelcho courir ce matin là. Les filles avaient d’autres projets : il fallait me rendre, comment dire ? Présentable. Je fis donc l’objet d’une séance de coiffeuse, qui s’évertua, la pauvre, à boucler et à coiffer ma crinière raide afin d’y faire tenir un oeillet rouge, juste derrière l’oreille gauche. On me fit sortir mon plus beau chemisier, ma jupe la plus élégante ( ? ) Et, après avoir en hâte avalé quelques sardines frites et un flan au caramel, il fallut se précipiter au premier « paseo » de la journée, Plaza del Castillo.
Et j'apprit le rite d’alors : les groupes de filles, dans leur plus belle tenues, croisaient les groupes de garçons, interminablement, dans une sorte de parade traditionnelle où s'échangeaient rires, propos, clins d’oeil complices, jusqu’à ce qu’un jour un garçon se décide à aborder franchement une fille et que commencent ainsi ces éternelles fiançailles qui pouvaient durer dix ans, mais donnaient le droit de sortir à deux, les parents faisant confiance au novio, chargé de la bonne conduite du couple.
Je les ai enviées, toutes ces filles, de vivre avec ce que je croyais alors être une forme de liberté : la vie m’a prouvé le contraire. Peu à peu les groupes s’éclaircirent, on se donna rendez-vous pour plus tard. Parce que l’heure arrivait : cinq heures du soir.
C’est alors le père de famille qui me prit en charge. Il me présenta, chemin faisant à ses vieux amis, qu’il retrouvait le soir au casino, là où seuls les hommes étaient admis. C’est avec lui, donc, que j’entrai dans les arènes, pour la première fois, saisie comme dans un frisson par la multitude de couleurs, d’odeurs, de cris, de chants, suffoquée par la chaleur, la poussière, entraînée par les clameurs qui annonçaient l’entrée du paseillo. Et soudain, les larmes aux yeux devant l’or des costumes, la robe noire du toro et l’enjeu du combat, je fus prise si fort par le drame que le premier sang du toro ne me fit même pas détourner la tête : la tragédie classique en parlait tellement de sang versé, je savais ce que c’était en imagination. Et cette fois j’étais au cœur de la tragédie. Ce fut le moment le plus intense que j’avais vécu jusqu’alors. Jusqu’au moment de vérité.
Voilà comment j’eus la « révélation » à l’âge de quinze ans, pendant les San Fermines, à la fin des années quarante. Pendant ma vie, j’ai essayé de transmettre un peu de cette expérience singulière. J’en ai fait ma culture , j’ai appris et enseigné la langue de Cervantes , j’ai fait réciter le « Llanto a la muerte de Ignacio Sanchez Mejias » de Garcia Lorca .Chez moi, j’ai une oreille de toro toute desséchée et une vielle banderille toute fanée ; je ne sais toujours pas si je suis « torista » ou « torerista «, je sais seulement ce qu’est l’aficion.
Tout cela parce qu’un jour de San Fermin , Josefina et son novio Javier attachèrent un oeillet rouge dans mes cheveux , pour que don Miguel , le père , soit fier d’emmener la francesita au tendido sombra voir sa première Corrida . Merci.
Plusieurs années de suite, mes parents me permirent de refaire le voyage : merci. Car c’est ainsi que naît la passion d’une vie.
Merci enfin à tous les acteurs de la Fiesta brava, du plus manso au plus sincère, merci de m’avoir appris ce qu’est la magie du "duende", qu’il faut donner du temps au temps et que le meilleur est toujours à venir, jusqu’au dernier soir du dernier jour, où dans le dernier souffle, il ne reste plus qu’à soupirer :


« ! Pobre de Mi ! »




SENOR PARTAGAS

Partagas n'est pas seulement une des plus anciennes manufactures havanaises, elle est aussi l'une de celles qui offrent le plus grand choix : quelques deux cent références enregistrées !
Longtemps cette marque a pâti d'une assez mauvaise réputation en France où l'on ne connaissait que ses cigares "machine". Car Partagas ne se limite pas, hélas, aux seuls havanes de prestige. Dans son catalogue, on trouve le meilleur et le très médiocre. Mais on retrouve dans tous ses modèles une même caractéristique : la puissance.
LUSITANIA de Partagas :
La puissance, le velouté et la gloire...
Ce n'est pas sans raison que cette vitole est, en France, parmi les plus recherchées. Un succés que n'explique pas seulement sa rareté de ces dernières années. A priori, pourtant, les Lusitanias ne payent pas de mine dans leurs boîtes traditionnelles à la décoration surannée. Coffret ou boîte traditionnelle, le plaisir commence par les yeux en découvrant ces cigares imposants, à la cape souvent maduro, soyeuse, d'un grain admirable, et riche en gras. Une attaque franche et souple. Un cigare qui chatoie entre rondeur et puissance soutenues par un bouquet d'arômes exceptionnels. Beaucoup d'allonge, un raffinement de texture étonnant. Exhalaisons de sous-bois humides et de champignons dès les premières bouffées ; notes empyreumatiques (café, cacao) relevées de miel, dans le deuxième tiers, et un final enthousiasmant qui laissera, le cigare achevé, le palais longtemps sous son charme. Car le Lusitania est majestueux, entêtant, voluptueux. Doit-on préciser que ce poids lourd se fume sans le moindre effort, grâce à un tirage parfait ? Un cigare culte qui mérite quelques égards. Un modèle exceptionnel du classicisme cubain. A déguster sereinement. Ce cigare de légende fera alors galoper votre imagination. Sa complexité peut échapper au débutant. (source Havanoscope - la photo ne représente pas les Lusitanias : Pas les moyens...)

La Pensée du Jour

Les écrits sont la descendance de l'âme comme les enfants celles des corps.

CLEMENT d'Alexandrie

v.150-v.215

mardi 25 novembre 2008

IL Y A DIX-SEPT ANS...


Il y a dix-sept ans Christian est parti. Pourquoi nous en souvenons-nous toujours avec émotion ? Pourquoi une jeune femme de vingt-cinq ans qui ne l'a jamais vu toréer m'a dit être allée aujourd'hui fleurir sa tombe ? Il n'y a qu'à se rappeller les faenas de Christian ou lire les livres d'Alain pour comprendre. Je remercie Jean-Paul Mari de m'avoir permis de reproduire son article. Je n'ai par contre pas pu savoir qui était l'auteur de cette photo de PANOLERO prise certainement quelques secondes avant l'accident.
Nimeno s'est pendu chez lui, dans son garage. Il s'est tué comme un agriculteur usé qui décide que les choses doivent s'arrêter là. Avec le même désespoir, solide comme un bloc de pierre, de ceux qui vous entrainent vers le fond. Malgré l'amour des autres, sa femme médecin, ses deux enfants, et Alain, l'ancien torero, son frêre ainé, son semblable, son double ; malgré la fidélité de ses amis, l'admiration de son public et la pudeur de Nîmes, sa ville d'adoption. Ces derniers temps, Nimeno était devenu sourd et aveugle au monde extérieur, il vivait reclus, ne voyait plus personne, s'enfermait dans son monde, silencieux et discret, encore plus qu'à l'accoutumée, comme s'il se préparait à s'effacer complètement. Il était malade, malade d'un amour qu'il vivait comme une passion, quand elle n'embrasse plus rien et qu'elle n'est que douleur et souffrance. Le torero avait besoin des toros. C'était sa vie, il le disait simplement. En lui enlevant les toros, on lui a enlevé la vie. Son corps est mort à Arles, un jour de septembre 1989 quand un toro de Miura l'a cassé en deux. Il s'appelait "Panolero", pesait 549 kgs et ses cornes pouvaient couper un bonheur en deux. Il s'est contenté de jeter l'idole vers le ciel et de laisser retomber, sur le sable, un handicapé aux vertèbres cervicales brisées. Nimeno n'en a jamais voulu au taureau, il n'en a jamais voulu à personne d'ailleurs, il n'avait pas de revanche à prendre, il disait simplement qu'il "faut toujours aller jusqu'au bout de sa passion". Il est resté 44 jours dans l'obscurité d'une unité de réanimation, son coeur et sa respiration se sont arrétés deux fois ; on le disait perdu, il a survécu et lutté des mois en réeducation pour réveiller ce corps-momie. Quand le miraculé a retrouvé l'usage du bras droit et de ses jambes, quand il a recommencé à parler, à marcher, à se laver, à écrire... Alors, Christian Montcouquiol, dit Nimeno II, s'est remis à parler d'avenir, à rêver de toros et, pour la première fois, à sourire. A Nîmes, on s'est remis à espérer. On l'aimait. Ce n'était pas un héros même s'il avait un courage fou, ce n'était pas une force de la nature bien qu'il se soit fait un corps d'athlète. Il avait le visage long, grave, les yeux cernés de sombre, un visage de passion qui se muait en masque de cire griffé par la peur du vide au moment de s'avancer dans l'arène. Il était mince et fragile, comme un adolescent qui vit son amour mais ne sait pas en parler. Aux autres les discours, les analyses et les envolées ; lui vivait le mythe taurin, brut et sans recul. On l'aimait, parce qu'il était celui qui portait le rêve. Lui, petit français et grand torero, avait réussi à s'imposer parmi les tous premiers, à faire taire les impitoyables critiques espagnols, à imposer le respect au monde terrible de la tauromachie. On s'inclinait devant son absolue sincérité, cette intégrité presque rigide dans le rituel, cette façon de se mettre face aux cornes, à la mort, quelque soit l'enjeu, quelque soit le lieu. Huit cent toros combattus, dix huit ans de carrière, trente cinq corridas par an, sa statue plantée à l'entrée des arènes de Cancun au Mexique... Il impressionnait. Nîmes, les aficionados français, les jeunes toreros qui voulaient marcher sur ses traces, et les anciens, Simon Casas et Alain, le frêre, dit Nimeno I, ceux qui avaient ouvert la voie avant de s'arrêter le souffle coupé par leur propre audace, tous regardaient cet homme fragile et silencieux qui semblait dire : "c'est possible". Il était celui qui justifiait le romantisme des autres, leurs fantasmes, leurs plongées dans l'univers magique de la corrida, comme un mythe sans fond. "Ce qui rendrait l'équilibre à mon frêre," disait Alain son double, "ce serait de rejouer sa vie devant les toros..." On espérait son retour, c'était fou et absurde. A 37 ans, Nimeno était perdu pour les toros. Sa main gauche, celle qui trace les naturelles, restait figée, immobile. C'était fini. Nimeno avait fini par le comprendre. Il avait fait mine de se faire une raison. Puis il s'était retiré du monde des vivants. Il savait qu'il ne pourrait plus jamais se planter au soleil, les deux pieds dans le sable d'une arène, étendre la main gauche devant lui, accueillir le toro et regarder la mort défiler devant lui. Alors il a préféré partir avec elle.
JEAN PAUL MARI

lundi 24 novembre 2008

UN DIMANCHE EN CAMARGUE

Un dimanche à tuer. Un de ces dimanches où l'on se traîne sans but, habillé n'importe comment, avec ce qui traînait, et où il n'y a pas à sacrifier à l'effort de se laver et de se raser. Officiellement, c'est pour laisser la peau bénéficier d'un répit face à la tondeuse de feu et aux détergents dermiques en tout genre. En réalité c'est qu'on est bien dans son jus, de temps en temps. Mais ce serait sale de l'avouer dans la nouvelle société hygiéniste. Un dimanche où vous allez juste gâcher du temps parce que la semaine de travail vous a éreinté et la rédaction du blog vous a ôté le sommeil et qu'il faut bien changer de rythme pour récupérer. Qu'ils ouvrent leurs magasins s'ils veulent, je n'irai pas y dépenser une peseta. Ce matin dimanche, vous avez eu le temps de boire deux tasses de café au sucrage bien dosé et sans vous brûler la langue. Le café n'est pas passé entre le filtre et le porte-filtre. Vous avez eu le temps de griller du pain, de sortir la gelée de fraises des bois des vacances en Lozère de l'été dernier où vous restiez des après-midi entières plié en deux au milieu des fourmis rouges et des buissons d'épineux, à aider vos beaux-parents à cueillir douze kilos de fraises minuscules pour avoir droit au pot de confiture annuel. Ce dimanche, vous vous êtes enfin affalé dans le canapé de cuir gras, résolu à n'en plus bouger de la journée et au moment où vous entamez la lecture du "Monde des livres" acheté le vendredi et recherché en vain depuis, "quelqu'un" dit :


- Tu as vu ? Le soleil sort... On ne va pas rester enfermé toute la journée ! Où pourrait-on aller ? Ca ferait du bien à la petite de sortir un peu...


Oui... en plus vous êtes en charge de la solution : l'idée géniale c'est vous qui devez la trouver... Sinon, la petite, la-petite-chérie-d'amour-à-son-papa-à-elle, qui est venue vous faire la bagarre dans le lit à six heures du matin vous brisant menu vos attributs virils de ses petits talons pointus histoire de vous prouver qu'elle vous aime encore plus le dimanche que les autres jours ou vous avez eu toutes les peines du monde à la réveiller pour l'école, eh bien, si elle est pâlichonne, ce sera votre faute, si vous ne l'avez pas sortie...Oui !


- Et puis au retour on pourrait s'arrêter chez mes parents ?


- Ah ? euh... oui... quelle bonne idée...! ;-(


Ce matin, en se dépêchant depuis que l'idée a été émise, on arrive à partir vers midi et demi. L'aube, pour un dimanche. J'ai dit "Beauduc" comme ça, peut-être parce qu'aux rencontres photographiques d'Arles j'ai vu une expo qui avait le golfe sablonneux pour cadre. Sur la route, des buses sur les poteaux, des crin-blancs dans les prés, des taches noires lointaines, des rizières miroitantes dans le contre-jour. On passe devant la Chassagnette sans s'arrêter. Trop chic, trop branché, pas la Camargue que j'aime. Préfère l'auberge du Pin Fourcat où les poules chient sur les tables et caquètent entre vos jambes quand vous mangez... Et puis la rouille et la gardiane de la mamé, c'est autre chose. Le vestige culinaire d'un monde qui s'en va. Un conservatoire des souvenirs d'enfance des plats de votre grand-mère. Sauf que la mienne, enfin la seule que j'ai connue était alsacienne, ce dont j'aurais pu m'abstenir de vous entretenir pour une meilleure compréhension du texte. Quoique... le "biais" des grands-mères en cuisine, la façon authentique et simple de mitonner les plats du terroir, soit reconnaissable partout et nullement "étoilable" au Michelin.


Arrivés à Beauduc avec nos sandwiches, nous constatons que sur tout le site, nous ne sommes que trois : un fada de Kite-surfeur, nous, et un fort vent soufflant tout droit de l'ère glaciaire. Le type au cerf-volant a l'air de s'éclater ! Un coup dans l'eau avec sa planche, un coup dans un espèce de char à voile : et youpi, vas-y que je m'amuse comme un petit fou-fou : un sportif, quoi... Il a même réalisé une oeuvre d'art éphémère en bois flotté : merci, ça me fera toujours une photo. Beauduc et sa lumière sous un ciel immense. Où des langues d'eau et de sable se donnent des baisers salés. Donc promenade cinglante, ingurgitation des sandwiches au soleil, ramassage d'usage des coquillages ordinaires enrobés d'interjections enthousiastes entretenant l'illusion d'une découverte rare à montrer à mamie au retour. Classique. Fin de l'après-midi, reprendre les dix kilomètres de piste jusqu'à Faraman-City. Je n'invente pas, c'est le panneau du lieu-dit. Soudain, surprise, au bord de la route, des toros. Il est vrai que les terres de la Belugue sont là. Des toros de Charlotte et Quinquin Yonnet. On s'arrête et on observe en silence dans la lumière du couchant. Ils sont jeunes, s'ébattent entre adolescents. Ils ont encore le regard doux et naïf des innocents. Ils sont tout près, juste de l'autre côté du fossé. Celui-là se dresse tellement tout en courbant l'échine, qu'il ressemble à un dessin du grand méchant loup de mon enfance qui voulait croquer son torero, un petit chaperon rouge muleta. Un moment magique qui valait le déplacement. Dire que certains voulaient rester affalés dans leur canapé.





La Pensée du Jour

Rien ne contribue davantage à la sérénité de l'âme que de n'avoir aucune opinion.
Georg Christian Lichtenberg
1742-1799

dimanche 23 novembre 2008

LA ROBE ROUGE








Moulée dans sa robe rouge, martelant les planches de ses talons, elle est venue embraser nos regards. Elle a dansé, brûlante, incendiaire, fascinante comme une flamme. Puis elle l'a quittée, foulée aux pieds, s'est mise à nu, s'est retournée, nous a toisés et nous a laissés. Seuls.


A Couteaux Tirés

Je suis une victime de l'info : que j'allume la radio ou joue de la zapette, que je lise le journal ou clique sur le net, on m'en entretient. Moi qui ne voulais plus vous énerver avec ça... (non là je mens, j'aime bien agacer, provoquer, cela opère un tri rapide : d'un côté les super vexés, de l'autre ceux qui me contrent d'une provoc encore plus énorme et là je jubile, j'ai peut-être trouvé un nouveau copain... ça porte un nom ? La perversion ? Bon ...) Tina et Ségo ont quitté les dessous-entendus affriolants et les sourires raccoleurs, ont arrêté de se voler les arguments pour ratisser plus large et se sont griffées toute la nuit. Si les hommes se battent comme les loups, les femmes, c'est affreux, s'entre-déchirent comme des hyènes affamées devant une charogne. Alos que nous, machos moyens, nous avons besoin de croire la femme incapable de tant d'agressivité.
Cela me rappelle un dîner en ville... Elle monopolisait la parole, débitait ses vérités à flux rapide, démontrait son efficacité professionnelle pour se démarquer de la femme au foyer, ces pauvres nunuches qui restaient coites autour de la table devant ses exploits de working-girl de haute volée dont la gestuelle même trahissait le mental de combat de cette femme en pleine démonstration d'une supposée séduction suprême. Emportée par ses certitudes, elle se tourna soudain - détail non négligeable - vers le seul homme de la tablée fraîchement libéré du joug conjugal et lui demanda tout de go :
- Et toi, quelle est la qualité que tu recherches particulièrement chez une femme ?
Et là le type, laconique, lâche les deux mots que tous les hommes présents avaient à l'esprit durant ce monologue fatigant :
- la douceur...
Je crois qu'une gifle ne l'aurait pas plus marquée. On l'a sentie traversée du souffle d'une déflagration. En deux mots il lui révélait son erreur fatale. Les pseudo nunuches avaient retrouvé le sourire, l'ambiance s'était détendue, quelqu'un trop heureux de profiter de la fenêtre de tir des turbulences égotiques avait lancé la fusée plus conviviale de son plaisant sujet de discussion. On n'entendit plus l'executive-woman de la soirée. Soit parce qu'elle réalisait que ressembler à un homme n'était pas le meilleur moyen de séduire un être le plus souvent attiré par son contraire, soit parce qu'il n'y avait ici que des ploucs aux ambitions conservatrices et ringardes avec qui elle perdait son temps.
Quel rapport avec les candidates PS ? Il semble que dans ce parti où l'on est peut-être plus progressiste que dans la bourgeoisie de province, (peut-être, hein...) on ait voulu s'offrir une rose, qu'on ait souhaité seulement une femme. On n'en est plus à essayer d'imposer la parité au PS, on offre l'exclusivité ! Pourquoi Delanoé dont la motion est arrivée seconde, s'est-il rangé derrière Aubry ? Assuré de perdre face à une femme et mieux valait donc partir bien accompagné qu'être abandonné de tous ? A la question d'un journaliste politique sur Delanoé qui l'aurait traitée de "ringarde et de salope", Aubry répond : "je n'en crois pas un mot, Bertrand est un ami". Il vaudrait mieux, en pleine alliance "Tout sauf Sego" ! Enjeux et tactiques... Mauvaises perdantes les femmes ? Certes à quarante-deux voix d'écart la perdante a de quoi se coincer le rire de hyène dans la gorge et la gagnante n'a pas de quoi siffloter d'un air dégagé. Un écart trop maigre, un nouvel acchoppement pour se déchirer un peu plus, se haïr un peu mieux, se battre jusqu'en justice où fleurissent maintenant les plaintes réciproques et tenter d'exiger un vote nouveau pour savoir enfin laquelle mordra à pleine dents dans la carcasse écartelée de cet ex grand parti : Quarante-deux voix, de quoi se déchirer quarante deux mois de plus à la table des négociations. En dessert, la nomination du ou de la présidentiable. Bel appétit !

vendredi 21 novembre 2008

COPLA FLAMENCA

Jusqu'à ce que le peuple les chante,
Les coplas ne sont pas des coplas.
Et quand le peuple les chante
Plus personne ne sait leur auteur.

Car à fondre son coeur
Avec l'âme populaire,
Ce qui se perd en renom
Se gagne en éternité

Manuel Machado


Si mi querer te estorbaba,
Por qué no me lo decia ?
Me huberia sacrificao,
Y hasta huberia dao la via
Porque tù huberias gozao.
Si mon amour t'importunait,
Pourquoi ne le disais-tu pas ?
Je me serais sacrifié,
Jusqu'à donner ma vie
Pour que tu sois heureuse.
Anonyme

jeudi 20 novembre 2008

POURQUOI ALLEZ-VOUS VOIR LES CORRIDAS ?

A LA CINCO DE LA TARDE + 6

de G. MOSCHINI


En attendant, une mouche s’est posée sur le « programme officiel » de l’après-midi. Officieusement, l’odeur de la mort a délégué ses pouvoirs.


En face, Les piques sont accrochés au mur comme les espaliers de chez mon kiné… et les castorenos n’ont pas la queue plate.


En attendant Le Calejon grouille comme les galeries étroites d’une fourmilière. Une reine blonde, mal à l’aise, s’est planquée derrière le Burladero gris, derrière les Burladeros rouges…
…en tauromachie, tout passage est étroit.


En face
Ce toril noir entrouvert d’où pointe la rosée perlée des habits de lumière, évoque « l’origine du monde ».


En attendant
Je me retourne souvent faisant mine de regarder le ciel.


En vérité
Ma voisine du dessus m’invite sans le savoir à mater ses dessous noirs plutôt échancrés.
A cet instant accroché, je me fous pas mal des bas roses des matadors… Olé !


Fresques en déplacement
Fresques pour tenter de déjouer la mort
Arabesques pour entrer dans la danse
Vérité suspendue qui nous accorde,
Un cours instant, à passer de l’un à l’autre
Ici, le désir semble plus léger que la mort
Le Torero avance (en guise d’offrande au public invité)
Ses doutes et ses incertitudes
Il écrit avec sa plume d’or l’aléatoire trempé
Dans l’encre rouge de la tête noire meurtrie
Comme la page blanche
Tout en la niant, il essaye de s’approprier l’écriture
Epreuve de vérité, danse du pouvoir et de la Mort
Les deux pieds dans le sable mouvant de l’arène,
Il cherche à ancrer nos errances jusqu’au bout
Et l’épée de notre désespoir
Il emprunte au passage la retombée du reste.

RETOUR AU CALME

Bon allez, je vous ai énervés ces temps-ci, alors retour à la zénitude, oups, pardon, retour au calme, laissons choir la nuit en montagne, là où l'altitude empêche de parler, là où on est moins serrés, stressés, livrés au bruit, à la promiscuité, à la pollution. Fermez la bouche, inspirez à fond par le nez, soufflez rentrez le ventre....schhhhhhh....hep, vous là-bas : ouvrez les yeux, j'ai mis des photos quand même... Ne jamais photographier des couchers de soleil : attendre qu'il se soit couché, immédiatement après la lumière est souvent trés belle. Et qu'est-ce qui fait une belle photographie ? Un bel appareil ? Un bon photographe ? Certes, mais aussi et surtout, une belle lumière. Avec le numérique et ses pixels perçants, les crépuscules ne sont plus si inabordables. Toujours aussi nostalgiques, ça oui.








La Pensée du Jour :

La justice ne réside pas dans les yeux des mortels qui, avant de connaître à fond le coeur d'un homme, le haïssent à la première vue, sans en avoir reçu d'offense.
Euripide
480-406 avant JC

I HAD A DREAM...

J’étais nu. J’avançais dans un couloir étroit comme un boyau sale dont on ne voyait pas l’issue. Presque sombre, seulement éclairé d’un néon bègue, qui clignait anarchiquement ses watts blafards. Je n’avais pas vraiment envie d’avancer sauf que, tout au bout, la silhouette élancée d’une créature m’attirait irrésistiblement. Un mètre quatre-vingts, cinquante-cinq kilos, des courbes harmonieuses, une queue de cheval guillerette, un sourire doux, la main tendue. Tout le long du couloir, à intervalles réguliers, des renfoncements où se tenaient des internautes près de leur PC. Immobiles, faisant seulement tournoyer dans l’air vicié du boyau, leur souris filaire. Ils avaient souffert apparemment. Les visages tendus de leur rancœur, dénués d’humour, ils attendaient. Je les interrogeais du regard, leur présentais un visage avenant, voulant percer à jour leurs pensées mais ils n’avaient pas envie de communiquer. Je n’entendais que le sifflement aigre des souris à la centrifugation régulière. J’avançais quand même, trop curieux de la vie. Dès que j’en dépassais un, il me frappait violemment de sa souris. Sur ma peau se tatouait alors un mot : ‘’prétentieux’’ ; ‘’sans talent’’ ; ‘’lamentable’’ ; ‘’verbiage diarrhéique’’. Mais là-bas, toujours la vision de cette silhouette qui permettait d’endurer les coups bas. Mais, quand enfin je l’atteignis, elle se volatilisa, disparaissant au grand galop, chevelure au vent de l’allure de son Mustang. Et là, tout s’est enchaîné : j’ai entendu du bruit derrière moi. Me retournant, j’ai reconnu un Bertrand Delanoé tumescent accourant à grandes enjambées tandis que dans un coin de la chambre où j’étais parvenu, DSK œil torve et babine avachie, seulement vêtu d’un imperméable beige au renflement suspect attendait d’évidence une ouverture… D’un quiebro aussi soudain que désespéré je réussis à éviter la charge Delanoesque ; il alla s’escagasser sur le lit où se trouvaient deux autres créatures. On ne les apercevait que de dos mais leur accoutrement permettait de supposer une féminité moins angoissante. Elles se vêtaient de la panoplie glamour la plus aboutie : escarpins, bas de soie, porte-jarretelles, guêpière. Deux petites cornes poussaient sur leur crâne, leurs yeux étaient rouges, leurs canines effilées et elles tentaient de s’entre-dévorer. Je voulus fuir mais tous les internautes s’étaient rassemblés derrière moi, me coupant la retraite. Les deux femmes se retournèrent alors et lorsqu’elles m’aperçurent, mon sort m’apparut clairement. Les internautes ricanèrent quand ils virent dans mon regard horrifié, que j’avais enfin identifié Martine Aubry et Ségolène Royal. Menaçantes, elles vinrent me demander d’uriner dans une grande urne translucide après quoi je devrais passer à la casserole amoureuse de l’une d’entre elles tandis que l’autre me possèderait de sévices vengeurs exprimant la douleur de l’abandon. On distinguait du placard où s’étaient finalement enfermés les deux hommes, des gloussements de grouses écossaises mâtinés de glapissements de fennecs en rut. Heureusement, la vision de Martine Aubry en porte-jarretelles était si horrible que je me réveillai enfin.

mercredi 19 novembre 2008

La Pensée du Jour

Il n'y avait aucune certitude ; seulement l'appel à cet oracle moqueur qu'ils dénommaient l'Histoire, et qui ne rendait sa sentence que lorsque les mâchoires de l'appelant étaient depuis longtemps retombées en poussière.

jean-Claude Van Damme non je déconne... Arthur Koestler

PLUS ROSE LA VIE ?



Fra-ter-ni-té ! Fra-ter-ni-té ! Fra-ter-ni-té ! Aaaaah… ça réconforte d’entendre marteler de bons principes républicains unificateurs. Si seulement ils fumaient les mêmes pétards avant de faire congrès… Y’a qu’à voir comment en leur sein, ils se l’appliquent le principe de fraternité ; on est loin du peace and love, plus près du pisse et morgue ; ça réconcilie avec la nature humaine ce petit monde désintéressé expliquant sur les ondes, l’indigent intérêt pour leur cas personnel face à l’impératif de la rénovation du parti. Franchitude ? Il est vrai qu’il y a le choix, en matière de leaders potentiels. Certains, peut-être parmi les plus crédibles comme julien Dray, ont renoncé devant l’ampleur de la curée. Delanoé ? Outre qu’il faille courir vite et ne jamais lui tourner le dos (comme avec les toros ? sauf que ce ne serait pas un coup de corne... - en cas de volonté procédurière homophobique veuillez attaquer Stéphane Guillon, auteur de la formule sur France-Inter - onde pourtant rosiphile), il est quand même l’homme de gauche se prévalant de libéralisme, pensant certainement ainsi, moderniser le discours socialiste : Pan sur le bec ! Crise mondiale pour cause de libéralisme débridé ! Pas en phase, le Bertrand ! Déjà qu’il faut prévoir pour gouverner, lui n’a en l’occurrence, pas manifesté la moindre capacité d’analyse. C’est ennuyeux : Incompétude ?
Martine Aubry…aaaah, Martine Aubry, la mieux placée !… J’ignore si vous me ressemblez, mais y’a des trombines, rien qu’à les regarder, ça vous abaisse le moral instantanément. Aucune étincelle dans l’œil, aucune fragrance de féminité, pas un atome de charme, rien ! Comme si vous lui aviez volé quelque chose, non ? Son visage boude en permanence. Pépère doit pas rigoler tous les soirs. Ou alors est-ce dû aux bas-joues Deloriennes ? L’attaque est basse, certes, mais postuler pour mener la cohorte sans susciter d’envie, je doute… Elle ne recrutera guère de nouveaux adhérents avec son absence de charisme. Or, il faut le savoir, pendant qu’on nous bassine les pavillons avec ce psychodrame, matin, midi et soir au point que de petits bloggeurs à la noix tels que moi-même, s’arrogent le rôle d’analystes politique, des chiffres font frémir : connaissez-vous le nombre d’encartés au parti socialiste ? Sur soixante-trois millions de Français ? Cent cinquante mille ! Soit 0,24 %. Déprimitude ? En fait, les journalistes parisiens moulinent, tout contents de trouver du grain à moudre mais à la vérité, tout le monde s’en fout ! D’ailleurs vous êtes déjà allés cliquer ailleurs si ça se trouve. Benoît Hamon, le petit jeune ? Peut-être un vrai socialiste, - ils ne sont pas si nombreux - Mais dans sa tête, le plus vieux ! Il vient tout juste de digérer la lecture du petit livre rouge et pense sincèrement que la société appelle de ses vœux, la Marxitude. Le pli est déjà pris et les chances oblitérées, se recommander plutôt au facteur tueur du parti communiste (puntilla) avec Miterrand (espada).
Bon alors, il reste qui ? Les éléphants ? Se trompent chacun dans leur travers : Fabius le grand bourgeois faux-cul, Lang le mondain démago et Jospin-vieille-chouette qui n’en finit plus de gonfler les poches de ses yeux, d’aigritude mal résorbée. Ca rigole à droite ? Attendez votre tour, un jour, j’amuserai les socialos, je m’occuperai de l’UMP… trois cent mille militants…pffff…ressortez les calculettes ça fait pas bezef non plus pour deux partis qui ont fusionné.
Strauss-Khan ? Bien trop occupé à aimer sa ''merveilleuse femme comme au premier jour'' ! Je n’aurais pas cru qu’il nous prenne tant pour des imbéciles, celui-là, avec son couple idéal. Sauter une petite secrétaire, rien que de très banal, il parait que les détenteurs de pouvoir sont très excitants… Faut dire qu'il a une arme secrète, le clin d'oeil permanent. Mais se croire obligé de nous rassurer sans prêter le flanc (si j’ose dire) à une aventure d’un soir, en se fendant d’un publi-reportage d’amoureux transis dans Paris-Match, là, non, pitié, trop c’est trop. Il pourrait utiliser les médias avec discernement ! C’est exactement comme s’il nous avait dit : "étant donné que vous n’êtes que des buses affublées d’un grand tunnel d’air à la place du cerveau, on va l'alimenter d’une version édulcorée de l’anecdote calomnieuse de ma séance d’hygiène extra-conjugale venue choquer les convictions chrétiennes de votre vie conformiste étriquée, pour ne pas risquer la totale disqualification politique" Ouf ! Maaaais ne t’inquiète donc pas DSK ! On n’est pas en Amérique ici !! Regarde, même ta femme, elle s’en fout que tu la trompes !!! Au contraire, t’es un bon pour tes concitoyens ! On n’est pas aussi naïfs que des Américains catastrophés de réaliser soudain que si tu trompes ta femme tu peux mentir aussi aux gens. Nous, on sait déjà que tout le monde ment toujours et partout, enfin ! ( et sinon… la jeune secrétaire… ? Elle était bonne…? Voilà, ce qu'ils voudraient savoir les Français.)
Et d’aillleurs, c’est quoi cette fascination des journalistes pour les politiques, mmm ? Toutes les journalistes sont maquées avec de grands fauves politiques : bonjour l’indépendance de la presse ! Elles feignent de les bousculer d'une petite question incommode mais dans la réalité, elles sont fascinées... Qui alors hein ? Qui ? Ta ta taaaa… il n’en reste qu’une, la Madone des faubourgs bien sûr, la maldonne des vraies bourdes aussi, à qui la victimisation cultivée va peut-être rapporter gros parmi les militants. Durant toute la campagne présidentielle, elle nous a répété qu’elle était une femme libre, droite dans ses bottes ; mais on s’en foutait qu’elle soit enchaînée par les éléphants ou assise dans ses pantoufles, on voulait juste connaître son programme ! Une Madone, êtes-vous bien sûrs ? Revenez à la photo, (source Midi-Libre) un portrait réussi où se distingue en un instantané de vérité, l’âme de la personne. Et moi, là, pas de miracle, la Madone ne m'apparait pas, j'me sens pas Soubirou du tout, j’ai la super trouille…! J'la voudrais même pas dans ma cuisine si elle me demande de débarrasser la table sur ce ton ! Je ne m'étonne plus que les éléphants soient tout en défenses.

mardi 18 novembre 2008

La Pensée du Jour :

J'ai passé une excellente soirée. Mais ce n'était pas celle-ci.
Groucho Marx

LA CUADRILLA DEL ARTE SUITE ET FIN



Franchement, on est pas fortiches ? Après un interminable trajet sans escale, après une tienta d'anthologie où l'on nous confronta à de monstrueux encornés, après une hospitalisation collective pour réparer ruptures tendineuses et polytraumatismes divers de bachouchages variés, n'importe qui d'autre - des hommes ordinaires je veux dire - aurait un petit peu accusé le coup, non ? Cela aurait été humain un petit coup de pompe passager... Eh bien nous, mais regardez-nous, tout guillerets, levant nos verres à nos exploits tandis que Manolo et Jaime de Pablo-Romero se retrouvent pour l'occasion : on pète le feu sacré ! Jovialité et condition physique immarcescibles !!! Un enthousiasme de novilleros prêts à en découdre à nouveau ! Vaya toreritos !







lundi 17 novembre 2008

La Pensée du Jour :

Selon les statistiques, il y a une personne sur cinq qui est déséquilibrée. S'il y a quatre personnes autour de toi et qu'elles te semblent normales, c'est pas bon...
Jean-Claude Van Damme

dimanche 16 novembre 2008

PUROS DE CUBA Y TOROS DE ESPANA

Rares sont les vieux couples qui n'entrent jamais en conflit. Puros et toros semblent être de ceux-là. Il est vrai que cette bonne entente fut facilitée par Séville, entrée historique de la production cubaine en Europe. De nos jours, l'Espagne consomme encore 45% des cigares exportés par Cuba. Il fut donc toujours fumé en corrida. Pour des raisons pratiques et physiques. Vous êtes sûr d'avoir deux heures à l'air libre pendant lesquelles votre moitié toujours soucieuse de l'hygiène de sa maison ne vous reprochera pas d'empuanter tapis et rideaux.
Ensuite, renforcer les plaisirs en les accouplant, ne nuit pas à la possibilité de passer une bonne après-midi : en supposant que la corrida est intéressante et comble la vue, on stimule aussi le goût et l'odorat par la combustion d'un grand module. De plus en plus fréquemment pourtant, on se trouve confronté dans les plazas à des "écologistes de l'air ambiant" qui vous contestent votre espace aérien vous demandant d'arrêter de fumer : l'occasion - restée unique j'espère- d'affirmer ma goujaterie:
"Ah ça madame ce n'est pas possible, nous sommes en plein air, ne venez plus si ça vous gêne. Bientôt vous demanderez aussi qu'on ne pique plus le toro et s'il a été invalide, qu'on le gracie ? Et moi, c'est votre parfum qui m'incommode".
J'ai remarqué que les reproches sont proportionnels à la hauteur de votre gradin. En barrera, aucune remarque, tolérance totale. Aux amphis, lynchage garanti si vous n'obtempérez pas. Entre les deux, la force d'une idéologie fluctuante : s'il est très révolutionnaire et populaire à Cuba de s'afficher puro en bouche, chez nous c'est un puissant symbole à effet contraire. Un ostensible et malodorant signe extérieur de richesse. Vous êtes fatalement un gros con de facho exploiteur des masses laborieuses, un gros richard imbu de sa personne, un vantard indifférent à la santé des poumons voisins. Une Chienne de Garde (vous savez la bande à Isabelle Alonso) croisée dans une soirée m'assura même que je devais avoir un tout petit pénis pour porter à ma bouche de tels substituts phalliques. Evidemment habitué a ce genre d'agression, ma répartie instantanée lui signifiant mon regret qu'elle ne soit pas jolie pour être invitée à vérifier si elle était ou non médisante, me fit replonger illico dans la catégorie des gros-cons-machos-fachos-fumeurs-vicieux-misogynes. Soit, on ne peut pas être aimé de tous, il faut l'assumer. Or, comme l'explique Michel Onfray :
Le cigare suppose la proximité amicale, complice, le lieu ad hoc, le retrait, l'état d'esprit libre et disponible pour des errances méditatives, le corps en état, l'âme libre pour le nomadisme spirituel, voire une solitude dense et joyeuse. Car le voleur de feu est tout le contraire d'un animal prédateur en quête de marquage de territoire. Il est plutôt familier des planètes où évoluent les artistes, là où les désirs et les plaisirs sont réconciliés pour le grand devoir qu'est la jubilation.
Fumer un bon Havane de temps en temps est autre chose que fumer continuellement la cigarette, c'est une conduite moins addictive et un plaisir éprouvé plus grand. Comparable à celui qui consiste à déboucher une bonne bouteille entre amis plutôt que de boire son litre de picrate quotidien. Comme le torero et la corrida, le cigare a ses "tripes", sa "cape" et ses "tiers". De sa cape, il faut évaluer sa qualité et une belle cape n'est pas toujours celle que l'on croit. Ne pas attacher d'importance à sa couleur, l'aspect foncé n'a rien à voir avec sa puissance comme l'expliquent les guides (Le Havanoscope) l'important c'est le gras qui s'évalue par le toucher. Une cape soyeuse, comme dans le toreo, est le signe de la qualité d'un cigare. Le guide nous apprend que :
Le vocabulaire de la dégustation du cigare est plus limité que celui du vin. Entre la sensation et l'expression, le vocable est sans doute plus pauvre, mais, paradoxalement, il apparaît plus précis dans la mesure où la terminologie souvent fleurie et parfois exagérément poétique du vin peut servir aussi à masquer le flou du jugement.
Voici donc un exemple de "resena" d'un cigare, en l'occurrence le plus vendu, le plus contrefait aussi, alors ayez à l'esprit que s'il vous a déçu il s'agit peut-être d'un faux...
Montechristo n°4
Le n°4 n'est pas le plus célèbre des havanes mais c'est le plus vendu au monde. A l'allumage, les notes sucrées et cacaotées l'emportent, assouplissant agréablement le palais. La puissance, suffisante et équilibrée permet un tirage parfait. Au deuxième puis au troisième tiers, les arômes glissent progressivement vers les épices (poivre vert), voire des notes animales (suint). Le final est plein et aromatique. Délectable, jamais rassasiant, ce puro est très séduisant. Il offre en outre, l'un des meilleurs rapports qualité/prix de sa catégorie.

samedi 15 novembre 2008

La Pensée du Jour

Aimer, c'est se voir comme un autre être vous voit, c'est être amoureux de sa propre image déformée et sublimée.
Graham Greene

L' Amour est très surestimé...



La première collaboratrice du blog est arrivée ! Une recrue de choix messieurs-dames ! Je sentais bien que cette "GINA" appréciait cet espace... Elle s'y promenait souvent, laissait des tonnes de commentaires dont vous ne lûtes que le dixième tant ils étaient élogieux ce qui aurait fini par me desservir... J'ai donc fait la rencontre virtuelle et blogosphérique de cette inconnue Ô combien sympathique et j'ai découvert qu'elle était une très grande lectrice : ses circonvolutions cérébrales et sa sensibilité digèrent trois cent livres par an. Qui dit mieux ? Elle est la bienfaitrice des libraires, le cauchemar des femmes de ménage avec ses millions de volumes à épousseter ! Alors moi, pardi, vous l'auriez fait à ma place, j'ai posé l'insidieuse question :
Et... produire de petits compte-rendus parfaitement subjectifs de vos lectures pour "Des Photos, des Mots et des Toros" cela ne vous tenterait-il pas chèèèèère Gina...? Si, qu'elle a dit ! Banco ! Conclu, allez hop ! Au boulot ! Deux jours après j'avais ce qui suit :
L’Amour est très surestimé de Brigitte Giraud
( J’ai lu. 5,10euros. Bourse Goncourt de la nouvelle 2007 )

Brigitte Giraud situe ses onze histoires, ses faux récits, chez nous, dans ce monde occidental, riche, dit développé. On passe - ce qui est rare - d’une nouvelle à l’autre sans changer de monde ou d’atmosphère, avec aisance, sans frustration ni difficulté.
On n’a pas le temps de se perdre parmi un nombre important de personnages : deux protagonistes, jamais nommés, sauf s’ils sont familiers voire célèbres, désignés par des pronoms, sans épaisseur, jamais décrits, vus en situation, transparents, universels, comme vous, moi. Des personnages vivants, auxquels on s’identifie tout de suite, qui s’aiment, se sont aimés, se quittent ou veulent se quitter.
Le narrateur reste près de nous ou avec nous, ses lecteurs, s’adresse directement à nous, ou nous inclut dans un « on » complice, nous tient par la main, nous promène et nous montre les deux personnages, qui se parlent, méditent là, devant nous ; en même temps se détaillent, avec une douceur, une finesse très minutieuse, subtile, diaphane, mais précise, toutes les situations qui les concernent ou pourraient nous concerner, nous renvoyant à nous-mêmes, à notre moi profond, à notre inconscient.
Jamais de colère ou d’acrimonie, encore moins de jugements moraux, on constate, on s’attriste devant le gâchis qui, insidieusement le plus souvent, se glisse dans les vies, dans l’amour qu’on a trop surestimé.
L’émotion nous prend et ne nous lâche plus.
GINA

vendredi 14 novembre 2008

La Pensée du Jour :

La première fois que j'ai vu une dame nue, j'ai cru que c'était une erreur.

Woody Allen

jeudi 13 novembre 2008

LES BOULES NOIRES

Il habite en garrigue. Un mazet amélioré dans une olivette bien entretenue ceinte de clapas. Il récupère l'eau de pluie, porte ses olives au moulin, travaille son potager et bricole dans sa remise au fond du terrain. Il nettoie un barbecue exclusivement nourri de feu de bois qu'il allume comme il se doit, sans cubes de pétrole aggloméré ou gel incendiaire lent pour citadins trop manches pour générer la flamme autrement qu'en l'attisant au sèche-cheveux ou en passant par le SAMU. Il ratisse son terrain de pétanque, pieds tanqués, en étudie d'un oeil expert, les pentes et les devers, pour aller têter le cochonnet dés qu'il pointe. Les têtaïres c'est sa spécialité. Vous savez, quand la boule touche le cochonnet. Le "but" qu'ils l'appellent les parisiens, le cochonnet ! N'a jamais baisé Fany chez lui. Faut que j'explique ? Eh oui, fatal, avec cette putain de mondialisation - qui n'atteindra jamais son mazet - :
Est-ce qu'un Québecois, un Belge ou même un ch'ti peut savoir ce que "baiser Fany" veut dire s'il n'a pas fait un stage intensif sur le vieux port ? Bon, eh bien c'est quand... et puis même les jeunes d'ici ne savent plus... pfffff... jouent plus aux boules les bezuquets... mais à la "playstation", au "skate-bôardeu"... ou font des "blogs"...:

- ouaiiiis t'es sur myspace tôa-eu...? Cool-eu, je vais te téléchargé-eu sur mon mp3 huit giga-eu et tu verras les pics de ma Wii-eu...

Eh bien si on en prend comme aux boules, treize à zéro, on a comme un gage, voyez, on embrasse Fany. Sur le cul. Qui était Fany à l'origine ? Justement, je me le suis toujours demandé... peut-être une prostituée du Panier ou de la rue Saint-Féréol ? Mais comme c'était un gage de perdant, elle était peut-être trés vieille la Fany ? Ou trés laide ? Ou sale...? bon enfin... cessons-là les supputations. Je visite un mazetier, donc. Un vrai de vrai. Un pur de dur. Le Mohican dernier. Son humour bon enfant du début du siècle,du XXème hein, il l'affiche sur les murs de son mazet et ça me fait penser que j'ai raté un de ses panneaux. Il dit : "ici vente de moustiques avec pedigree". Vous ne riez pas, je parie ? C'est qu'ils ne sont plus très nombreux ceux que cela distrayait... et je suis sûr que vous ressentez la naïveté de son humour et l'ambiance nostalgique de son mazet. Moi ça me parle encore un peu parce que j'ai bien connu un monsieur de son âge : mon père. Dans une tout autre catégorie cependant, car mon père, au moins aussi nimois dans l'âme, n'avait rien d'un mazetier. Toute sa vie, alors que nos jeux d'enfants se coinçaient entre des murs de béton du dernier chic, il nous a répété qu'il avait vendu son mazet "les Boules Noires", pour une bouchée de pain. "Les Boules Noires" t'as raison papa... Mon père était angoissé par la nature. Les arbres qui se balançaient dans le vent étaient jugés menaçants. Le vent qui sifflait dans les branches, lugubre. Le vert tendre de l'herbe, déprimant. Le mauve des Iris sauvages, funèbre. Il aimait le bruit, le béton, la pollution, l'activité humaine frénétique, les lumières, les magasins. Quand j'ai acheté mon terrain, tout content je l'ai emmené le visiter. Il est resté un long moment sans rien dire, presque pantois, l'embrassant posément d'un regard panoramique, avant de conclure :

- Tu vois Marc, tu me donnerais un milllliiaaard que je n'habiterais pas ici...

Mais papa, de soins et d'amour tu aurais été riche si tu avais habité avec moi, j'ai pensé, pendant qu'il me confortait gentiment dans mon choix... Mais il avait raison, tout ça l'aurait fait dépérir plus vite, l'indépendance donc l'autonomie, seules conservent. Si je m'inquiétais trop il me regardait avec son fameux regard 357 magnum bis et il me disait :

- Qu'est-ce que tu veux qu'il m'arrive ? Qu'un type me trucide ? Qu'une voiture m'écrase ? Et puis après ? A quatre-vingt treize ans, j'ai fait ma vie, non ? A quel âge elle est partie ta mère ?

Là, j'admets que pour un fils rarement admiratif, je me disais quand même avec mon regard 525 choke ter, le seul capable de soutenir son 357 meurtrier : Olé, torero ! Par quel doblone je me retrouvai feinté et coi ! Mais tels sont les effets néfastes de la digression : on était parti pour se réjouir de l'humour d'un mazetier avec ce texte, et finalement où atterrit-on ? Quoique, on avait encore les francs, et, un milliard de centimes, même en insistant grassement sur les syllabes, ce n'était pas énorme. De toutes façons on finit toujours par payer, affectivement. C'est peut-être pour ça que le mazetier prévient : "interdit d'entrer...renfrogné". Avec le temps, on y parvient.