jeudi 14 février 2013

BLANCANIEVES

A l’instar du conte des frères Grimm dont s’inspire cette œuvre, la cruauté de la marâtre, la bienveillance des nains toreros et le destin cruel, triste et fatal de Blancanieves ne sont que la trame de base donnant lieu à des situations, rebondissements, surprises, symbolismes et émotions qui se succèdent sans temps mort ni répit et qui captivent sans pouvoir s’échapper de l’atmosphère envoûtante créée.


Le film débute par un travelling sur des rues sévillanes désertes, façades blanches et carte postale début XXème. Puis, en plein écran apparaît la plaza : La Colosal de Sevilla, ruedo vers lequel convergent spectateurs et autres véhicules qui semblent littéralement glisser sur l’écran (étrange d’effet d’optique).


Le torero Antonio Villalta, en cette année 2010, prie dans la chapelle. Musique grave et lente. La caméra fouille, déambule et débusque des expressions, des ombres, des attitudes révélant la solennité grave de l’instant et annonciatrices du drame imminent.


Inutile de décrire la suite de l’histoire tant de fois abordée par la littérature et le cinéma. Mais sans mièvrerie ni infantilisme, bien au contraire, le film nous mène à travers mille rebondissements inattendus où le degré des messages, codes ou références est à estimer bien au-delà de ce que l’œil nous donne à voir, même si l’image est d’une telle qualité que « regarder » seulement est déjà un bonheur.


La beauté de ce film réside davantage en ce qu’il dégage comme atmosphère onirique, magique, à la fois mortifère et picaresque, sensible et cruel, ludique et grave.


Blancanieves chemine vers sont destin à travers aventures et étranges rebondissements où parfois le rire le dispute au drame, et où l’irréel auréole scènes et évènements. Le symbolisme est omniprésent et l’absence de dialogues ne fait que rendre plus « parlant » le contenu de l’œuvre.


Long et aventureux voyage en roulotte à travers de superbes paysages arides de la Mancha ( ?) où un arbre isolé, tronc tordu et feuillage échevelé sur la crête d’une colline semble rappeler des errances passées d’un Don Quichotte. Plazas de villages rustiques où les pitreries toreras des nains déclenchent des rires édentés (de vraies « gueules ») et moqueries.


Ce film contient, en plus de sa beauté à l’esthétisme indéniable où le noir et blanc et les gros plans des visages sont stupéfiants et inoubliables, un jeu de piste, de codes, de références où la symbolique est omniprésente. Nos rêves les plus secrets doivent certainement avoir cette (non)couleur.


C’est une œuvre étrange … cruelle, douce, angoissante, fraîche, profonde, inclassable …. La plus belle et émouvante image restant celle de la fin où, sur un gros plan d’une paupière close de Blancanieves au grain de peau velouté, une larme s’échappe des cils inertes et glisse lentement …

                                                               Maja Lola

11 commentaires:

Pedroplan a dit…

Oui c'est un OVNI, ce film, d'une étrange beauté, à voir absolument

Marc Delon a dit…

Trois visages magnifiques (au moins) de l'émotion à couper au couteau, en tranches épaisses, (je ne mange plus de coq...) une pellicule Kodak noir et blanc et une reine de la resena !

Pedroplan a dit…

Oui, belle chronique. J'aurais peut-être un peu insisté sur le jeu tout en retenue de Daniel Giménez-Cacho. Et ce film a éveillé le souvenir du Bombero et ses enanitos toreros... Au fait, existent-ils toujours où ont ils été réduits au chômage par la correction politique ?

Maja Lola a dit…

Vous avez raison Pedroplan, son jeu d'homme meurtri au regard profondément triste est remarquable ... mais, à commenter le jeu des acteurs, que dire de la vénéneuse et sombre Maribel Verdu qui crève l'écran, l'élégante et forte Angela Molina dansant un flamenco sarabande fatal, la jeune et fraîche Sofia Oria dont les moues rappellent curieusement une certaine moue de Bardot dans sa prime jeunesse et une Macarena Garcia, cristal rieur aux yeux hallucinants de profondeur et beauté ....

Anonyme a dit…

Des enthousiasmes convaincants, un compte rendu habile comme d'habitude.
On ira.
Gina

Anonyme a dit…

Bon, on y est allé.
Ca pue la mort, la décadence mais sans le talent des Pasolini, Fellini ou Almodovar. Un ersatz de tout cela.
Bref : salmigondis à la sauce XXI siècle. Blurp.
JLB

Marc Delon a dit…

Eh bé putain... bon ben je m'excuse alors de pas faire du Flaubert à chaque texte ni du Ansel Adams à chaque photo, désolé...
Pour les corridas ne te déplace que pour Tomas, tu gagneras du temps...!

Maja Lola a dit…

Heureusement qu'une oeuvre ne peut pas plaire à tout le monde ....

Je crois que je vais y retourner, pour me "mortifier" un peu plus ;-)

Cependant, pas d'accord JLB sur le terme ersatz. Et puis pourquoi le comparer à Pasolini, Fellini et Almodovar qui eux sont dans la truculence, jouissance de la chair et l'outrance colorée ? C'est sûr, que ce noir et blanc onirique et muet est en est aux antipodes ...

el Chulo a dit…

Bonjour Maja, moi ça me donnerait plutôt envie de le voir. Très belle chute de la resena., et très efficace! bravo!

Jlb, on dirait que vous n'appréciates point!

je me demande ce qu'en pense el garbanzo negro, "el flaco" qui me poursuit de ses acidités jusque dans mon blog. Me cago!

Pedroplan a dit…

Quitte à comparer, j'aurais cherché du côté de Bunuel

Maja Lola a dit…

Exact Pedroplan ...