mardi 12 mai 2009

QUESTION DE STYLE : ESPLA AL VIOLIN




Si j'ai mis la plus spectaculaire photo en premier-celle où il semble arrêter la charge de ce toro d'une main- cette série doit plutôt se lire de bas en haut.






5 commentaires:

Bernard a dit…

Cher Marc,

De ce que la photo - comme media - me paraît plus "ouverte" que le cinéma (ou la video), ces 3 clichés en sont une magnifique illustration: alors que le cinema t'embarque dans son tunnel d'images (d'où tu ne peux t'extraire que difficilement) - et te raconte son histoire, la fixité de la photo propose comme un point de départ à tes propres images mentales (c'est toi qui te fais ton film...).
Ainsi, ici et de haut en bas: la première photo donne une impression d'irréel (le toro, dont on ne voit que les pattes avant - décollées du sol - semble voler; et surtout, la main droite d'Espla paraissant juste posée sur la pointe de la corne gauche ajoute à cette irréalité - "qu'est-ce que cet homme arrêté vient faire devant ce toro qui vole?" - de telle sorte qu'on pourrait croire qu'il s'agit d'un "montage" - le toro aurait été rajouté) ; sur la deuxième, l'impression d'irréel demure, mais comme inversée (ce serait Espla, virevoltant en l'air dans une posture incongrue que seul l'arrêt sur image permet de capter, qui semblerait ajouté à ce cliché d'un toro penché et à qui il manque la corne droite...); quant à la troisième, l'impression de vitesse donnée par la posture du toro, et l'espèce d'immobilité maladroite - voire hésitante - de la position d'Espla, qui semble en arrêt devant la bête, nous disent à coup sûr qu'il va pour le moins "se faire envoyer en l'air" par ce toro!... Magie de la photo...

Merci pour ces 3 clichés - et ce bel hommage à l'extraordinaire banderillero qu'est pour l'éternité Luis Francisco Espla!

Bien à toi - Bernard

Marc Delon a dit…

Merci bernard pour cette lecture sensible qui rappelle l'avantage de la construction de l'image mentale sur l'avalanche subie ou effectivement (bonne image...) la circulation guidée sous tunnel à électrons. D'où la noblesse supérieure du livre et de sa vie en nous, sur le cinéma. D'où la valeur d'une attitude féminine distinguée infiniment plus érotique qu'un écartèlement pornographique. D'où la plus grande délectation à la démonstration pénétrée de maîtrise d'un art du toreo fait de lenteur, de majesté et de pronfondeur, sur la débauche d'énergie braillarde Padillesque ou Ferraresque. Ces deux (par exemple) ayant quand même le mérite d'exister pour nous servir de contrepoint révélateur des autres...
Bref, la force de la suggestion sur l'étalage cru.

Au sujet du "passement de jambes croisées" on sent bien la contrainte avec le bas du corps mobilisé pour s'éloigner et le haut par cette torsion du buste qui permet de planter : pas facile !

Anonyme a dit…

Oui... c'est fou ce que deux mots peuvent parfois suggérer comme tristesse. Deux simples mots, comme "moi aussi". Selon à qui ils s'adressent, selon à quoi ils répondent, selon le ton employé. Deux mots qui suggérent que tout s'écroule, que rien n'a d'importance, que rien n'est vrai.

Bernard a dit…

Mon cher Marc,

Voici un autre commentaire - s'autorisant de lui-même (!): "Une femme dessinée ressemble à une femme, tandis qu'une femme écrite fait rêver à mille femmes" (Gustave FLAUBERT, dans une lettre à son éditeur - à propos de Mme Bovary, lui recommandant de n'ajouter aucune illustration à son texte...)

Bien à toi - Bernard

Marc Delon a dit…

Tout à fait, je connaissais. Ainsi chaque lecteur pouvait rêvasser à l'incarnation de "sa" madame Bovary plutôt que de recevoir son impossibilité en pleine face par le diktat du dessin (non, j'explique pour ceuss qui ... ;-)