mardi 17 février 2009

Un Petit Livre Génial... : 2 ième extrait

L'écrivain peut-il être une femme ?

En France, les femmes deviendront bientôt majoritaires dans l'exercice de la littérature. C'est un trait capital de la modernité, déploré en tant que tel par certains occidentaux issus de la gent masculine et porteurs d'une vision épique, héroïque, spermatique de l'écriture. Quand ils évoquent le déclin de la littérature, c'est à cela qu'ils pensent, consciemment ou non. Elle n'est plus ce qu'elle était=elle n'est plus un sport d'hommes, elle n'est plus la guerre continuée par les moyens de la plume. L'écrivain pénidé ne peut plus se vivre en Ulysse moderne et pénélope tricote en snobant les prétendants qui friment sous sa fenêtre...

... La présence des femmes a tout changé, comme quand une cousine s'invite à un regardage de porno en groupe, tout de suite c'est plus les mêmes blagues. On polit la langue, on rigole moins gras. les bonnes femmes ont transformé le champ (de bataille) littéraire en salon de thé, bientôt vous verrez que les éditeurs auront transhumé vers le Marais. Emmasculés se sentent les écrivains mâles. Si d'aventure ce n'est pas déjà fait, ils contractent une misogynite aiguë qui bien sûr se métastase en racisme...

...Souci coextensif : le temps que passent les femmes à écrire, elles ne le passent plus à lire. Avant régnait une délicieuse anomalie... longtemps ce truc de bonnes femmes qu'est la littérature a dû l'essentiel de ses productions à des hommes. En résumé : les hommes écrivent, les femmes lisent. Ainsi se reconstituait, via les livres, un dispositif donjuanique débarrassé des inconvénients du genre, l'homme pouvant conquérir 1003 femmes sans endurer l'embarras des pannes d'érection. Il n'avait qu'à répandre dans les librairies sa semence de papier et attendre que pousse en ses lectrices un amour aussi platonique que totalement libidineux, aussi spirituel que totalement assouvi par des masturbations impulsées par la relecture de Madame Bovary, où se jouait en abyme le drame d'une névrose de lectrice.

Heureusement nous avons encore devant nous quelques années de bonne vieille sexuation. Pour la plupart les lecteurs sont des lectrices, il suffit de prendre le métro (mais pas la ligne 6, surtout pas). les hommes ne lisent pas, ils se contentent de rêver qu'ils publient et qu'on les lit. Tous les jours, des femmes tombent amoureuses sur la seule foi de livres que parfois l'auteur dédicace dans une librairie, et alors la lectrice rejoint la queue. Queue parfois longue, parfois moins, et quand arrive son tour elle bégaie trois mots, parmi lesquels son prénom s'il lui revient à temps-en général elle s'appelle Anne-Sophie. L'écrivain feint de ne pas voir le trouble qu'il a éveillé rien qu'avec ses doigts ; il griffe une dédicace ambiguë en laissant tomber un trait d'humour d'une voix de cow-boy assagi, puis donne congé d'un "merci Anne-Sophie" posant une fausse réciprocité, car plein d'autres Anne et plein d'autres Sophie ont rejoint la queue, dont une seule aura assez foi en son charme pour tenter le coup à la fin de la signature. Si les circonstances le permettent, le coup aura lieu.

Il est possible qu'après le sexe où par définition l'auteur se sera révélé moins performant qu'en fantasme, la lectrice lui confie écrire à ses heures perdues. Très possible, même, puisque tout le monde écrit. L'EM (écrivain mâle) a l'habitude. Avec un soupçon de condescendance, il laisse son adresse pour recevoir un recueil de poèmes qu'il ne parcourra que d'un oeil, préférant relire la lettre qu'Anne-Sophie aura jointe pour y traquer des allusions sexuelles. Tout est normal.

Ca se complique si AS informe EM qu'elle écrit des livres publiés, risque de plus en plus grand comme on l'a dit. Là, le type ne peut plus vraiment faire le beau... ...A partir du moment où Amélie Nothomb fait s'étirer des queues, l'exercice de la célébrité littéraire n'est plus attaché à la virilité. Le mot écrivaine commence à entrer dans les moeurs lexicales, bientôt il sera accepté et fera subir à la figure de l'écrivain ce que l'élection de Ségolène ou Martine en 2012 fera subir au poste suprême....

...Se sentant dépérir, l'EM a un dernier soubresaut de la couille gauche. Ok les bonnes femmes écrivent, mais elles n'écrivent que des histoires de bonnes femmes ! Episodes menstruels douloureux, déliquescence conjugale, viols traumatisants, deuil inachevé d'un père incestueux, petites confessions riquiqui quand les vrais livres traitent de la guerre, du combat de coqs planétaire qui s'appelle l'Histoire avec un H comme Hommes....

... Qu'une femme parle de sa vie sexuelle, et on lui reproche d'évacuer la littérature par le bidet. C'est quand même étrange. le supposé mystère féminin est la passion centrale de la littérature, laquelle cependant ne trouve pas son compte lorsque les premières intéressées livrent des infos pour le percer.... ....Précisément c'était le mystère en tant que mystère qui les excitait... ...Dans A une passante, Baudelaire feint de regretter que la passante ne fasse que passer. Au contraire, qu'elle passe vite son chemin et n'encombre pas le poète de sa présence réelle. Que le commerce avec les femmes se limite à une passe. Or elle s'arrête cette pute...

7 commentaires:

Anonyme a dit…

N’en déplaise à MM. les écrivains, les Duras, Nothomb, Lessing, les Pancol, Millet, et proche de nous, Régine Detambel, pour ne citer que quelques noms qui me viennent à l’esprit, si elles ne déploient pas toujours leurs talents dans les hautes sphères de la science fiction ou de la réfection économique, globalisante du monde, (et encore, je n’en sais rien ! ) par leur imagination, leurs réflexions, leurs subtilités, la finesse de leur art, elles plaisent.
Il n’empêche Marc, que ce passage est passionnant à lire, -merci-, et l’auteur inquiet n’a pas à s’inquiéter, son analyse et son écriture en témoignent.
Gina

Anonyme a dit…

bégaudeau ? l'antimanuel de littérature ? pas lu.
à gina : lisez paul léautaud quand vous en aurez marre des écrivains
chaleureux. même bégaudeau est alors un bedeau.
je vous embrasse.

ludo

Anonyme a dit…

OK
Merci.
Gina

Anonyme a dit…

merci....merci...pour...quoi ? le conseil de lecture ou la bise ? ;-)

Anonyme a dit…

Merci pour tout, conseil qui sera suivi plus bise à ne jamais refuser, très appréciée et rendue, tout cela était sous-entendu.
Gina

emma a dit…

des photos,des mots et des TOROS!!!!!!!j'adore toujours autant tes articles mais tu ne mets pas souvent des choses sur les TOROS.....c'est dommage,je pourrais allé dans un autre blog,mais il n'y a que le tiens qui me plait!
STP MARC!!!!!!!!!!METS UN PEU DES TOROS!!!!!
bisous de la costa!

Anonyme a dit…

Tràs drôle, bien vu.Un rêve parfois: si les livres étaient "anonymésé"...