mercredi 28 avril 2010

Campos y Ruedos 01




De quel poids négligeable auraient pesé mes arguments en faveur de ce livre : tout le monde sait le copinage qui nous lie. Alors j'ai demandé à Maja Lola dont j'avais remarqué les commentaires sagaces, de bien vouloir s'en charger. Elle a dit "oui"... Je la remercie et vous livre donc ses impressions sur ce volume de littérature taurine collectif. Moi, je dirais simplement que la tauromachie vue de la lorgnette de ceux qui l'aiment et la défendent sans autre intérêt que de vivre les émotions, le plaisir et l'écho intime qu'elle renvoie, c'est forcément rafraîchissant. Logique, non ? De plus, aimer écrire au sujet d'une passion ne pouvait que potentialiser le plaisir, et des auteurs et des lecteurs.


Résumer ce livre me semble un exercice périlleux et délicat, voire impossible. C'est vouloir décrire des vécus, des sensations, des rêves, des folies, des instants de grâce, des ressentiments, des haines, de la compassion, très divers dans leur expression et leur forme.
C'est donc par coups de cœur, par auteur, que je fais mon miel car je crois être une "gentille" mais pas toujours "consensuelle" ...
Tous les thèmes sur le TORO sont abordés (lieux, élevages, toreros ...) entraînés aussitôt que nous sommes dans une tasca madrilène où l'on savoure goûts, odeurs, bruits, mais aussi échanges aficionados avisés et fougueux (La Venencia. J. Durand)
Un séjour à Salamanca nous laisse pantois avec un inventaire à la Prévert échevelé et évocateur (333. Ph. Marchi).
Point sensible. L'incommunicabilité entre les pro et l’anti-corrida qui nous mène à la question : pourquoi chercher à convaincre ? Pourquoi justifier des choix ? Les vivre ou les affirmer en les revendiquant devrait suffire (Aux armes ! J. Pradet).
TOROS !
Force, puissance et caste de 6 toros Raso de Portillo indomptés qui auraient supporté avec bravoure un travail plus exigeant, plus adapté à leur valeur (Et la terre a tremblé. J. Pradet)
Comment ne pas se rappeler les 7 piques de Montenegro (Yonnet) puis un seul cri "indulto !" resté sans effet ... (Yonnet. F. Bruschet)
D'autres évocations de toros bravos viennent rappeler que tout n'est pas perdu. La fin du sobradero Oreganer nous fait vibrer : l'attente pleine de lyrisme du sorteo, "l'épée libératrice du matador (...) sous une chape de silence trouée par d'ignorants et malheureux pitos" (Le grand voyage. Ph. Marchi).
Et que dire de Clavel Blanco (Arles) bête de 610 kg qui ressemble à un vulgaire corralero et qui aguanta 5 piques et 20 minutes plus tard face à un torero minus ? (Clavel Blanco. F. Bruschet)
De Diano, bête courageuse et redoutable et autres Saltillo (Les souris et les gnomes. H. Angulo), Toro Lunar à la robe si singulière (L. Larrieu).
De Confitero, toro bravo qui avait tout à partager et qui a été "expédié" alors qu'un toro digne doit pouvoir recevoir 3 piques bien maîtrisées et mesurées ? (L'énigme du toro de lidia. Th. Thurriès).
Quant aux élevages, une fin annoncée des encastes glorieux fait ressortir la sublimation des toros de Dolores Aguirre qui conservent encore force et valeur (En réponse aux abolitionnistes. F. Bruschet)
De même qu'un plaidoyer pour la liberté de choix et la diversité rappelle que les critères de choix et d'appréciation de l'esthétique d'un toro ne sont pas explicables. Aucune vérité en ce sens (cornes, poids, ...) Il faut accepter l'effet de surprise d'une corrida, spectacle éphémère et imprévisible. Humilité devant ce mystère (Plaidoyer pour la liberté de choix. Y. Olivier).
Puis Marchi nous entraîne avec fraîcheur et simplicité dans la finca de Angel Nieves Garcia ou comment plonger dans un campo profundo parmi des êtres taiseux, simples et généreux (Voyage au bout de l'Aficion. Ph. Marchi).
Beaucoup d'émotion et d'élégance du patriarche PALHA, hombre de otras edades (Fernando Palha. L. Larrieu).
Enfin, une découverte de Mirandilla où le marquis de Albaserrada nous rappelle le novillo Laborioso, seul toro indultado en la Maestranza. Notre gardois Fabrice Torrito officie en ce lieu, chargé d'un "agrotourisme intelligent". Mon voyage en Andalousie me les firent connaître tous deux au cours d'une visite au campo ensoleillé dont je garde un beau souvenir (Mirandilla. Y. Olivier).
Et que dire des Toreros ?
D'un César Rincon touchant (Le jour le plus spécial de sa vie. F. Bruschet) à un José Tomas négligeant toute qualité artistique pour se crucifier dans une folie suicidaire aux prises de risques gratuites (José Tomas. F. Bruschet)
D'un Nimeno II capturé et immortalisé par l'objectif de Putterman et dont le regard triste semble déjà dans l'au delà à un Espla pris par un Valverde avec la complicité d'un vent traître et sournois (Luis Francisco Espla. F. Bruschet).
De l'émotion aussi avec l'évocation de "Tomatito". Ode à ses racines, au destin de son peuple d'Egypte en Andalousie, où la douleur du chant et de la musique devient à la fois profonde et délicieuse (Las seis hermanas de "Tomate" J. Pradet)
Avec la photo de Bastonito "qui lit le cartel". Vie exceptionnelle de César Rincon où douleur, drame et réussite font la légende du maestro (Regarde. C'est un peu d'Amérique L. Larrieu)
L'humour n'est pas en reste en évoquant une tienta dans la finca El Collado où il est question d'une faena dédiée à la com' et dont le marketing "youtubesque" n'a rien à envier à notre Clooney qui nous fait tant fantasmer (nous, les hembras !) (Something else. L. Larrieu)
Le tourisme gastronomique menant à tout, est mis en évidence le combat chevaleresque que mène José Tomas pour sauver la crevette ibérique. Cela vaut bien l'abandon d'arènes majeures pour se consacrer à une tournée dans des arènes "costadelsoliennes" : la relance de la crevette passe par là !
Idem pour des arènes françaises "people" (Dax) ou "temple planétaire de la tauromachie » (Nîmes by Simon) (Il faut sauver la crevette espagnole. L Larrieu)
Restons dans la gastronomie avec ces truculences gargantuesques et autres bacchanales sur les gradins de Pamplona. La glacière de Maria, puits sans fond, vaut le détour ! (Dancing King. L. Larrieu)

Le dernier chapitre, la Rentrée, est désopilant. C'est du Pagnol du Sud-Ouest, voire .... du Sud tout court ! Dialogues vivants, "avé l'assent" qui sent bon Nîmèssss (dixit un ami lozérien). Cette saynète mériterait une mise en scène, autour d'un fino, pour clôturer une soirée de fête
Maja Lola

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Maja Lola, vous êtes drôlement sérieuse et compétente, autant en tauromachie qu'en écriture. Je suis sûre que toutes les personnes citées se plairont à retrouver les remarques qui les concernent.

Gina

Maja Lola a dit…

Merci Gina,
mais ma compétence en tauromachie est relativement modeste par rapport aux "pros" de ce blog.
Cependant, inspirée par ce livre que j'ai trouvé vraiment intéressant, j'ai pris plaisir à en faire la resena.
Maja Lola

Anonyme a dit…

naaan... y'a pas de "pros" ici, rien que des amateurs mateurs de toros

Maja Lola a dit…

A l'Anonyme "pro"videntiel ...
Quel pointillisme sur la signification des mots !
Je ne vais pas m'étendre sur le sens que je donne au terme "pros" dans le contexte de ce blog. Disons que je trouve dans ce dernier suffisamment de compétence dans les commentaires aficionados, de richesse descriptive, d'humour et bien d'autres intérêts qui ne nécessitent pas plus de développement. Tout cela bien loin de votre "amateurs mateurs de toros" assez réducteur.
Maja Lola

Marc Delon a dit…

Amateur-mateur de toros, moi, ça me va...
Merci encore pour ce résumé qui donne envie d'acheter ce livre et un peu déçu qu'aucun des huit rédacteurs forcément passés par ici ne vienne dire bonjour.

Maja Lola a dit…

Pas de déception, Marc, sur les rédacteurs peu intéressés (ou peu inspirés ?) semble-t-il par ma resena.
Cela n'enlève rien aux bons moments que j'ai passé à le lire et à en parler sur ce blog. Pourvu que ce soit partagé par de nombreux lecteurs qui achèteront le livre !
Gina a apparemment apprécié ?
Vous l'avez publié, donc aimé ?
Es suficiente ...
Maja Lola