samedi 2 juillet 2011

Luna y Fuego à l'Impérator

Longue attente lorsque devant la foule médusée on vit passer, après l’heure annoncée de début du spectacle, les plateaux de tapas y vino en direction des coulisses …. Mais comme nous allions bientôt oublier notre impatience !

Devant ce mur éclairé des jardins surmonté de vases de géraniums qui nous transportaient dans un patio andalou, les hommes se déploient sur la scène : un guitariste, deux cantaores, un palmero.

Sobriété, silence, recueillement qui prépare cette soirée prometteuse.

Un cante où deux voix très opposées alternent leur art. Limpide et puissante pour l’une, voilée et secrète pour l’autre : comme étouffée par un velours épais, voix qui évoque celle des gitans rompus aux quejios que berce souvent un tinto dans les tascas le plus obscures de Jerez …

Le chant perce la nuit accompagné par la guitare et les palmas. Silence religieux lorsque sur la table les nudillos des hommes debout rythment la montée de cet hommage aux astres, cet appel au démon intérieur… long appel qui finit par la voix déchirante du cantaor nous emportant dans l’émotion de cet instant de grâce.

Puis elle arrive … monte lentement les marches, tête baissée, mesurant ses pas. Robe rouge sang, traje de Fuego, zapatos rojos, pelo azabache … la scène lui appartient. Soudain, comme un orage qui éclate, un cyclone déchaîné, elle danse ! En quelques déplacements rapides elle prend possession de son espace, visage endurci, traits tendus, zapateo puissant qui laisse pantois, réalisé de manière hallucinante par une femme qui frôle la cinquantaine et dont l’embonpoint est trahi par sa robe moulante ajustée aux caderas. Mais là nous avons une vraie gitane, pur jus, de la « raza calé » comme on dit là-bas …. Una emperaora qui, regardant le ciel dans sa danse, nous fait nous sentir humbles et terriens.

Puis elle cède le sitio à José Moya. Danseur virtuose à la technique infaillible, bien travaillée artistiquement, bien maîtrisée. Une énergie qui dépoussière la scène au sens littéral du terme et qui lui procure un plaisir que l’on voit exprimé sur son visage à la longue chevelure mouillée.

Mais lorsque paraît à nouveau La Farruca … tout devient plus lumineux, plus magique. Elle reprend possession des lieux. Tableau plus sombre, robe de nuit d’un taffetas élégant et austère. Traje de Luna. Et la force de sa danse qu’elle maîtrise par un temple profond et inspiré que déchirent des fulgurances époustouflantes de son jeu de zapateo nous rappellent que c’est elle, la grande, la Luna y Estrella de esta noche.

Au salut final, lorsque la gravité de son visage s’est estompée, que son sourire est venu l’illuminer, tous mes voisins de spectacle ont été unanimes …. « comme cette femme est belle …. ! »

Et je n’ai pas pu m’empêcher de penser que j’y voyais la beauté révélée par ce bonheur qu’elle venait de vivre et de nous offrir ….. sa danse avec le duende.

Maja Lola


9 commentaires:

Anonyme a dit…

Lola, je pense qu’il était voulu ce décalage horaire qui repoussait les cris perçants des martinets du crépuscule vers cette inoubliable nuit d’été.
Le compte rendu précis, vivant et savant nous fait mieux revivre ce spectacle tout en contorsions dans ses contrastes visuels et sonores aussi curieux qu’émouvants.
Gina

Marc Delon a dit…

"inoubliable nuit d'été" ? Est-ce par hasard vous seriez repartie avec le danseur gitan, Gina ? Bon, bien sûr, si ça ne nous regarde pas...
Ah là laaaa je connais l'effet produit : ses mouvements du bassin qui amènent des frissons partout et puis ses coups de talons qui disent "viens" et descendent directement dans notre petit coeur tout mou : imparable !
Maja Lola attention, Gina est en pleine puberté en ce moment, faut pas l'emmener voir des trucs trop... matisants.

Anonyme a dit…

Le gitan qui ne cessa de chanter, il avait un charme irrésistible.
Gina

Marc Delon a dit…

Oui, certainement car votre premier commentaire je l'ai reçu trois fois... ça indique une certaine fébrilité jusqu'au bout des doigts...

Anonyme a dit…

Marc, ça indique que ma live-box se moque de moi de plus en plus.
Donc, stop aux projections de fantasmes !
Pour moi, une belle nuit en été, c'est celle qui tombe très tard, lentement, en laissant aux martinets le temps de folâtrer entre les toits, à une chauve-souris le temps de battre des ailes quelques secondes avant que le ciel clair s'assombrisse et s'étoile de plus en plus. C'est aussi quand il fait juste un peu frais.
G

Maja Lola a dit…

Gina était enchantée et ravie en effet ... et il est dommage que l'heure tardive de la fin du spectacle ne nous ait pas permis un "after" .... histoire de gratifier cette puberté qui pulse. N'est-ce pas Gina ? Bon, pour le gitan il y avait vraiment trop de demande ! On s'est contentées du jeu de prunelles admiratives.

Maja Lola a dit…

Au fait Marc, tu as fait un bon choix de photo de La Farruca, gitana autentica avec son dernier fils : le plus que prometteur El Carpeta, petit prodige qui fait déjà de l'ombre à son frère aîné Farruquito.

Elixirman a dit…

Qu'est ce que c'est super chiant les articles sur les TOROS, non ?

Marc Delon a dit…

J'avais trouvé bcp de photos de la Farruca comme vous l'avez vue, dans une de ses robes de spectacles, mais comme tu avais évoqué la "raza calé"...

Ben ça dépend si on les aime ou pas les Toros, elixirman... si on y apprend quelque chose ou pas... Bientôt, ici un article génial sur les toros...