UNE FEMME PEUT-ELLE ETRE AFICIONADO ?

Bien sûr que non ! A vrai dire, la question même, est étonnante : comment peut-on croire à une idée pareille ? C’est un thème ridicule, inabordable. Je me rappelle bien cette après-midi-là, à Céret, où Max eut cette idée saugrenue qu’il me lâcha en pâture, m'encourageant à écrire sur le thème, m’assurant que c'était dans mes cordes ! Il ne croyait pas si bien dire, lui qui lâchait l’éponge et me faisait monter sur un ring où j’avais tout à perdre ! Ici pas de round d’observation : les quelques amies amicalement sollicitées, ont toutes frappé très fort, cherchant le KO d’emblée. J’ai pourtant recruté mon légendaire jeu de jambes, arriver de loin, fente avant, repartir très vite, encerclement, retrait du buste, enfin vous voyez le tableau. Mais elles ne me lâchaient pas et je fus sommé de m’expliquer sur l’utilité d’une telle interrogation et de son sillage de sous-entendus péjoratifs et ringards ( oh là là, quelle susceptibilité...).

J’ai donc tenté de dire que l’expression complète est « aficionado a los toros » et ces dames ne pouvant être que ce qu’elles sont, c’est-à-dire d’émouvantes, gracieuses et fragiles personnes auréolées de cette si touchante sensibilité ( je marche sur des œufs…) qui nous rend si fragiles et dépendants, que généralement, les pseudos-toreros que nous prétendons être sont en conséquence menés quotidiennement tels de gentils anoubles ( eh, oh ! je parle pour vous ! ), ces dames donc, réagissent comme leurs gênes, leurs hormones et la nature les prédisposent, c’est-à-dire en éprouvant une aficion a los toreros.

C’est comme pour le football : vous croyez vraiment qu’elles goûtent le râteau de Zizou, le passement de jambe de Viera, l’amorti de Toulalan, la vista de Ribery et la stratégie du bloc-système ? Non, vous ne me ferez pas admettre cela. Ce qui leur plaît, c’est de voir vingt-deux jeunes milliardaires en culotte courte courir après un joli ballon capricieux ! A la corrida, Madame aime d’abord le soleil, son ostensible toilette ( oui, je ne parle que des femmes féminines, les autres ne nous intéressent pas..) la musique, l’ambiance bigarrée de la foule et, et,…les fesses bien moulées des toreros. Très important ! Ca alors, ne le niez pas mesdames, les fesses et au verso tant de virilité si précieusement moulée vous affriole. C’est récurrent dans votre discours et, pas bégueule, nous le comprenons ! Si ! Dans ces conditions, il est illusoire de nous persuader que vous vous piquez d’apprécier la pique par exemple...

Vous savez le gros monsieur ? C’est un picador…, sur le cheval pataud qui est vilain avec le toro… Vous savez le toro, là, en bas, ce truc noir avec des cornes, qui court partout… Et les cornes, là, de chaque côté de la tête, parfois honteusement raccourcies pour vos vedettes préférées, ce qui vous indiffère, eh bien voilà… Pour beaucoup d’entre nous c’est très important, la pique ! C’est là que se révèle la bra… Pardon ? La mèche de jais de Javier Conde ? Sa taille souple…son beau visage ? Oui… enfin… je ne sais pas… Il passe quand même souvent à côté de ses toros non… ? Quoi ? C’est pas grave, il a de belles fesses ? Ah, ben… sûrement… si vous le dites… Et… quoi ? Comment il marche au paseo ? Ben… comme nous quand nous sortons les poubelles, en mettant un pied devant l’autre, alternativement… non ? Ca ne vous fait pas le même effet ? Pardi il ne porte pas de sac poubelle lui, au paseo ! Et malgré votre cadeau de ce beau pyjama satiné ridicule que nous portons pour vous plaire alors que notre vieux tee-shirt est si doux, ça reluit évidemment moins qu’un traje de luces…

Ah bon ? Nous ne maîtriserions même pas une déambulation de débarrassage de table, traînant nos vieilles pantoufles à moitié déchiquetées, laissant dans l’évier des couverts à ranger dans le panier du lave-vaisselle, alors que lui et sa prestance naturelle s’accommoderaient de fauves dangereux qu’il subjuguerait par son flamenquisme de beau gosse ? Vous voyez bien que vous n’êtes pas des aficionados ! C’est pas un lidiador ce type, enfin ! Il est incapable de régler le moindre derrote, il ne sait pas faire un doblone, rien ! Il ne connaît pas les terrains, sinon les chambres de ses jeunes groupies auxquelles mesdames nous n’aurons pas la vulgarité de vous assimiler !!! Dieu soit loué !!!

Oui ?…Il est ?… Que ?… Quoi ? Beau ?!??…
Bon alors là, d’abord, c’est subjectif… Nous on le trouve très laid, hein, pour commencer… Ensuite, s’il est beau, admettons..., quel mérite il a ? Aucun… et puis, Brel l’a chanté, être beau ça rend con, c’est pas nous qui l’inventons… Tandis que nous… Nous, vos maris, vos compagnons, nous qui pourtant vous avons enseigné notre aficion, nous qui ne vous avions pas expliqué les choses comme ça, de quel charme discret se parent nos personnes quand même ! Vous avez oublié ou quoi ? Et puis le centre, c’est le toro ! C’est sa tête à lui qu’il ne faut pas quitter des yeux ! Pas le visage christique et pénétré de cet Apollon andalou dont chaque gouttelette de sueur qui perle fait loupe à vos fantasmes en donnant à ses mèches de jais plus d’émouvante brillance !!!

Vraiment c’est décevant de vous avoir révélé tous les bons toreros, un peu vieux, un peu gros, un peu couards, à notre image quoi, et soudain constater que vous ignorez les lacunes techniques de cet usurpateur de Conde, quelle déception ! Non, vraiment on ne peut pas vous parer du titre d’aficionados, Mesdames, vraiment pas !

Mais, bon…, aficionadas…, mmmouais…